« Le moyen d'ennuyer est de vouloir tout dire » : c'est ainsi que Voltaire justifie sa propension à l'ironie et au second degré dans ses écrits et la prospérité lui donne raison, son oeuvre la plus célèbre n'est ni un essai, ni un traité, c'est un conte philosophique, Candide, qui utilise toutes les ressources de l'argumentation indirecte. Les ouvrages des philosophes relèvent pourtant, le plus souvent, de l'argumentation directe. Peut-on vraiment soutenir que l'argumentation indirecte est plus efficace que l'argumentation directe ? Nous verrons dans un premier temps les atouts de l'apologue, puis nous nous intéresserons de plus près à ceux de l'argumentation directe, avant de réexaminer cette question dans une optique littéraire plus générale (...)
[...] Pangloss pour l'optimisme, Martin pour le pessimisme, le vieillard pour la sagesse orientale, et Candide, au final, représentera le point de vue de Voltaire. Chaque auteur va donc choisir sa stratégie argumentation en fonction de son talent et de son public. L'essentiel, c'est de convaincre et de persuader au mieux, et pour cela, il faut être lu ou entendu. Or, si on écoute les avocats et les hommes politiques, c'est de l'histoire qui leur assurera la postérité. Mais qui se souvient du contenu de leur propos, combien de personnes lisent les œuvres des philosophes sous forme d'essais ou de traités ? [...]
[...] Les ouvrages des philosophes relèvent pourtant, le plus souvent, de l'argumentation directe. Peut-on vraiment soutenir que l'argumentation indirecte est plus efficace que l'argumentation directe ? Nous verrons dans un premier temps les atouts de l'apologue, puis nous nous intéresserons de plus près à ceux de l'argumentation directe, avant de réexaminer cette question dans une optique littéraire plus générale. Chacun se souvient des contes qu'il a lus ou entendus dans son enfance, plus sans doute que des leçons de morale qu'on a pu lui infliger. [...]
[...] Un peu plus tard, on apprend à l'école des fables de La Fontaine. Les animaux qui parlent, le comique de leurs mésaventures, la brièveté et la variété du récit, tout concourt au plaisir d'une histoire simple et familière qui ne manque pas cependant de nous donner des leçons pratiques sur la vie et la société. C'est ainsi que nous apprenons la méfiance à l'égard des flatteurs dans le Corbeau et le Renard, la patience dans Le Lièvre et la tortue, la valeur de la liberté dans Le Loup et le Chien. [...]
[...] Pourtant, ces deux auteurs sont des philosophes des Lumières et ces œuvres de fiction sont une satire en règle de la société du XVIII ème siècle et entraînent le lecteur dans une authentique réflexion philosophique ainsi, Candide oppose à l'optimisme de Leibnitz une sagesse raisonnable qui conduit au bonheur. Toutes ces argumentations indirectes ont donc bien une réelle efficacité. Pourtant, tout n'y est pas toujours clair, l'implicite laisse forcément une marge d'erreur dans l'interprétation. Ainsi, La Fontaine n'exprime aucune morale dans La Cigale et la Fourmi et beaucoup sont tentés de l'interpréter comme une simple reprise de la morale d'Esope. Tant pis pour celui qui n'a pas su être prévoyant ! [...]
[...] Le risque d'erreur est évidemment bien moindre dans les argumentations directes. Ainsi, dans sont Discours sur l'origine et les fondements des inégalités parmi les hommes, Rousseau énonce clairement sa thèse : l'homme à l'état naturel est bon, et c'est la propriété qui va déclencher la corruption et la misère dans la société. Pour nous convaincre il utilise une argumentation très structurée par des liens logiques, des périodes, des parallélismes, des oppositions, des rythmes binaires, toute les ressources du raisonnement. Il serait d'ailleurs parfois difficile d'utiliser une autre méthode que l'argumentation directe dans certaines circonstances et certains types de discours. [...]
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