Antoine et Cléopâtre, rédigé par Shakespeare en 1623, semble au premier abord, traiter en priorité de la relation du puissant Romain Antoine et de la fatale Égyptienne Cléopâtre, ce qui n'est pas faux. Toutefois, Antoine et Cléopâtre est une tragédie. Or toute tragédie repose sur un système triangulaire. La troisième personne de ce système triangulaire est Octave-César. En effet, c'est lui qui possède la puissance qui s'oppose au couple tragique. Mais Octave, un jeune homme ambitieux et inexpérimenté, peut-il si facilement faire sombrer un homme fort et expérimenté tel qu'Antoine, chef apprécié et suivi par ses troupes ? Il y a là un mystère pointé par la tragédie que les thèses girardiennes éclairent. Le rapport de force entre Antoine et Octave-César peut s'éclairer de cette manière, mais qu'en est-il du personnage de Cléopâtre, femme de tête, passionnée ?
[...] la Violence et le sacré, p100), de sorte qu'entre eux, on observe une forme d'escalade de la violence, depuis de simples reproches dans la scène 2 de l'acte II et allant jusqu'à une bataille rangée dans le dernier acte. Le kudos la domination violente (cf. la Violence et le sacré, p228), passe de l'un à l'autre. Antoine défait Octave sur terre, mais Octave est vainqueur d'Antoine sur mer. Les deux hommes paraissent d'égales forces. Cependant, c'est Antoine qui cèdera finalement. Pourquoi ? Antoine est celui qui semble à de nombreuses reprises en position de force. On parle de lui comme : so great” (IV ; “brave emperor” (IV 4). [...]
[...] Cela nous donne le second trio : César, Antoine, Octave, autour duquel se fédère l'action. Le troisième trio est celui que forment Antoine, Octave et Pompée. L'opposition commune avec ce dernier permet de faire taire momentanément la rivalité entre les deux premiers. Mais finalement, la crise d'indifférenciation est trop forte et le jeu de l'exclusion et du sacrifice change de cible. Finalement, c'est Antoine qui sera expulsé par l'acte violent. Le quatrième trio de pouvoir est celui formé par Octave, Antoine et Cléopâtre. [...]
[...] Dans les faits, Antoine sacrifie sa réputation, son honneur et sa tranquillité, toutes choses qui lui commandent de respecter et d'honorer son union avec Octavie, pour une relation tyrannique qui joue sur la menace et la crainte. Pourquoi ? C'est qu'il existe une tierce personne qui fait poids dans l'affaire. Il s'agit de César (Jules). Celui-ci par son propre désir, a désigné à son héritier vers quel objet devait se porter son désir. Ce poids du modèle est perceptible bien plus dans la relation amoureuse entre Cléopâtre et Antoine que dans toutes les autres oppositions de la pièce. [...]
[...] Antoine, Octave et Lépide se sont réparti le monde. Lépide n'est qu'un fantoche dont la pièce ne parle que fort peu. Il laisse le champ libre à la rivalité d'Antoine et Octave. Ceux-ci doivent pourtant faire face à un ennemi commun, Pompée C'est pour cette raison que le ressentiment des deux chefs est mis provisoirement de côté. L'alliance d'Antoine et d'Octave passe par le mariage avec Octavie. Cette réconciliation permet de faire taire temporairement les rivalités. En effet, à la mort de César, le partage du monde s'est fait principalement entre ses héritiers : Antoine, chef reconnu et respecté et Octave, jeune homme inexpérimenté. [...]
[...] C'est pourquoi elle fait preuve aussi de violence guerrière à l'égal d'un homme, mais elle est et reste une femme. N. Moraux nous indique dans Façons tragiques de tuer une femme que la tragédie, bien qu'elle laisse du champ libre aux femmes pour s'exprimer, tient leurs actions dans des limites qui ne s'affranchissent pas de la différence des sexes. Ainsi, bien que Cléopâtre veuille être à la tête de sa flotte de guerre, as a man elle prend la fuite, terrorisée, comme une femme Dans les faits, c'est Antoine qui empêche avec ses armées un retournement du pouvoir. [...]
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