La Chanson de Roland, oeuvre anonyme de la fin du XIe siècle, a pour épisode central la défaite de l'arrière-garde française contre les Sarrasins à Roncevaux en 788. Roland, qui donne le nom à la chanson, est un des plus fidèles chevaliers de Charlemagne, avec Olivier et Turpin.
C'est à ce dernier qu'on s'intéresse dans ce travail : Turpin est un archevêque guerrier très vaillant qui accompagne Roland jusqu'à la mort. Pour mieux comprendre son rôle, nous allons essayer d'analyser d'abord les sources historiques de ce personnages et la façon dont il est caractérisé dans la Chanson, pour passer ensuite à sa double fonction d'homme d'église et de guerrier et finalement à la description de sa mort.
[...] Nous ne savons rien de l'apparence de Turpin : est-ce qu'il était grand ? Quelle était la couleur de ses cheveux ? Il en est ainsi pour la plupart des personnages des chansons de geste, puisqu'il s'agit d'un genre littéraire concentré sur l'action, en particulier les combats, et les descriptions sont donc rares.
Les chevaliers sont plutôt caractérisés par des objets qui leur appartiennent, tels que leur épée, leur cheval ou autres armes ou accessoires. Ceux-ci revêtent une importance telle qu'ils reçoivent souvent un nom propre : l'épée de Charlemagne s'appelle Joyeuse, celle de Roland Durandal, et celle de Turpin Almace.
[...] Turpin est un archevêque, donc un homme d'église. En tant que tel, il exerce sa fonction sur le champ de bataille : on le voit prêcher, absoudre, bénir les combattants en leur chercher une sépulture chrétienne. Il essaie aussi de réconcilier Roland et Olivier, au nom de Dieu (...)
[...] Le roi est effectivement le seul maître de la chrétienté dans la Chanson, il dialogue avec Dieu et a une relation privilégiée avec lui. La fonction du personnage de Turpin dans la Chanson de Roland est donc double, comme son personnage : d'un côté il justifie la tuerie des sarrasins et soutient plus en général l'esprit de croisade. De l'autre côté, il définit la place - inférieure - de l'église dans le rapport avec le pouvoir politique. Bibliographie Short, Ian (éd.), La chanson de Roland, Lettres gothiques, LGF Faral, Edmond, La chanson de Roland, Étude et analyse, Mellottée de Mandach, André, Naissance et développement de la chanson de geste en Europe VI, Chanson de Roland, Transferts de mythe dans le monde occidental et oriental, Droz, Genève Short, Ian (éd.), La chanson de Roland, Lettres gothiques, LGF pp.39-40. [...]
[...] v.2242 : Turpin est mort, le guerrier de Charles. Faral, op.cit., p.237. Faral, op.cit., p.203. vv.2962-2973 : L'empereur fait faire la toilette de Roland et d'Olivier et de l'archevêque Turpin : il les a fait tous trois ouvrir devant lui, dans une étoffe de soie il a fait recueillir leurs cœurs ; dans un cercueil de marbre blanc ils sont placés. Puis ils ont pris les corps des trois barons, ils les ont mis, les seigneurs, dans des peaux de cerf, tous bien lavés d'aromates et de vin. [...]
[...] Les exploits de Turpin, c'est le symbole de la foi agissante, riche de ses œuvres, qui établit sur la terre la royauté chrétienne»[24]. Turpin représente l'idéologie de la croisade qui permet l'apaisement de la conscience des combattants et même une exaltation : ça ne fait rien si on tue beaucoup d'hommes, ce sont des païens. Effectivement, en lançant son appel à la première croisade en 1095, le pape Urbain II laisse entendre que tous ceux qui mourront comme soldats du Christ pourront gagner la gloire du martyre [25]. [...]
[...] Il abat Corsalis, un roi de Barbarie, versé dans les arts maléfiques et qui provoque sa haine au premier chef. Il abat Siglorel l'enchanteur, qui est déjà descendu en enfer grâce aux sortilèges de Jupiter. Il abat le roi Abisme, dénommé du nom même des gouffres maudits, noir comme poix, fermé à la foi, et dont l'écu est le présent d'un démon. Il abat enfin Malquiant, fils de Malcud - beaux noms de mécréants venus de la sombre Afrique. En ces félons, ce qui terrasse Turpin, c'est le paganisme personnifié, c'est l'idolâtrie et tous ses crimes. [...]
[...] Ceux-ci revêtent une importance telle qu'ils reçoivent souvent un nom propre : l'épée de Charlemagne s'appelle Joyeuse, celle de Roland Durandal, et celle de Turpin Almace. Lorsque Roland et Turpin combattent côte à côte, le comte s'exclame : Sire, a piéd estes, e jo sui a ceval ; Pur vostre amur ici prendrai estal ; Ensemble avruns e le ben e le mal, Ne vos lerrai pur nul hume de car. Encui savrunt paiens a cest asalt Le num d'Almace e cel de Durendal ! [...]
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