Alexis de Tocqueville, 1805 -1859, égalisation, conditions, inéluctabilité, démocratie
Sous l'Ancien Régime, dans la société aristocratique au sein de laquelle régnait les privilèges, les individus naissaient inégaux en droit à la naissance. Chaque ordre (clergé, noblesse et tiers état) était séparé juridiquement et bénéficiait de droits et de devoirs qui lui étaient propres).
La reproduction sociale était totale : les individus étaient immobiles dans la hiérarchie sociale, la mobilité sociale nulle. Ainsi, les membres du clergé ne payaient pas d'impôts, alors que ceux du tiers état étaient notamment soumis à la gabelle (impôt sur le sel). Les maitres et les serviteurs formaient deux mondes distincts uniquement relies entre eux par une relation d'autorité.
[...] II ) Les conséquences sociales et économiques de l'égalisation des conditions A-L'émergence d'une forte mobilité sociale et des positions sociales réversibles La première conséquence de l'égalisation de conditions est l'existence d'une forte mobilité sociale. Les sociétés démocratiques sont marquées par une égalité de droit et donc par la possibilité, pour chacun, d'accéder à n'importe quel statut social : on dit que les positions sociales sont ouvertes. Cela favorise (sans l'atteindre) une certaine égalité de fait, puisqu'un nombre croissant d'individus accède au métier qui lui permettra de s'épanouir et/ou de s'enrichir. [...]
[...] L'individualisme affirme le primat de l'individu et nous voyons ce processus d'autonomisation des individus agir dans les sphères : - privée : désinstitutionalisation de la famille, privatisation des rapports conjugaux, choix du conjoint, divortialité, monoparentalité, naissances hors mariage, choix des relations sociales, libre-arbitre, individualisation des croyances religieuses ; - publiques : déclin des structures d'encadrement (syndicat, partis politiques . ) ; - du travail : individualisation des salaires, du temps de travail . Si l'individualisme tend à se renforcer avec le développement de la démocratie au sein de laquelle les conditions s'égalisent, il peut également créer la crise du lien social: anomie, déviance, isolement des individus, exclusion, chômage que connaissent les sociétés modernes. [...]
[...] C - Troisième conséquence : l'égalisation des conditions favorise l'enrichissement matériel et l'individualisme Pour TOCQUEVILLE, l'individualisme est un sentiment réfléchi et paisible qui conduit chaque citoyen à s'isoler de la masse de ses semblables et à se retirer à l'écart avec sa famille et ses amis Tocqueville a une vision très perspicace de l'individualisme. Alors que sous l'Ancien régime seul quelques privilégiés pouvaient mener la vie qu'ils souhaitaient, en revanche, en démocratie, l'enrichissement matériel de la classe moyenne permet à un nombre croissant d'individus de disposer d'une autonomie (par rapport à la famille, à l'école, à la religion, au parti politique, au syndicat . Ainsi, l'individualisme tend à se renforcer quand les conditions s'égalisent avec la démocratie. [...]
[...] Cela les rendrait donc faibles face au pouvoir politique fort (Etat), qui leur imposerait sa toute puissance. En effet, en démocratie, le pouvoir politique peut se prévaloir d'une légitimité absolue, puisqu'il est désigné par le peuple lui-même ou du moins par sa majorité. Cela peut déboucher sur un véritable despotisme démocratique. - le despotisme démocratique est le deuxième risque pour la démocratie. Pour Montesquieu, le despotisme est le gouvernement d'un seul, qui impose ses choix de façon arbitraire et absolue (sans tenir compte des règles et des lois). [...]
[...] On assiste bien depuis le 19eme siècle et surtout depuis 1945, à une égalisation des conditions. La consommation de masse, la généralisation de la protection sociale, l'augmentation généralisée du niveau de vie ont bien été des facteurs de démocratisation, mais aussi d'uniformisation de la société (on parle aussi d'homogénéisation des modes de vie). On peut considérer que les sociétés européennes d'aujourd'hui correspondent à la définition de la démocratie selon Tocqueville. Certains sociologues dont Henri Mandras, reprennent en partie la vision de Tocqueville, près d'un siècle et demi plus tard, en montrant comment la moyennisation de la société française conduit à réactualiser les analyses de la stratification sociale. [...]
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