Problématique de lecture : il s'agit ici de la première page du roman d'Émile Zola. On doit donc se demander quelles sont les fonctions de cet incipit et comment Zola parvient à captiver d'emblée son lecteur. Par ailleurs, dans la Préface de la deuxième édition de son oeuvre, Zola affirme que son « but a été un but scientifique avant tout » : cet incipit confirme-t-il l'impersonnalité et l'objectivité auxquelles Zola prétend s'être astreint ? (...)
[...] Un endroit repoussant et méprisé Zola présente le passage du Pont-Neuf de manière dévalorisante, comme on le voit à : 7 o la périphrase de la première phrase, qui donne d'emblée le ton : une sorte de corridor étroit et sombre (l.2-3). o la présence du champ lexical de la saleté : noir de crasse vitres sales les dalles gluantes (l.11), la nuit salie (l.11), les étalages gris de poussière (l.15). o des termes indiquant la laideur : une horrible couleur brune (l.25), la muraille monte, noire, grossièrement crépie, (l.29-30). L'auteur emploie aussi à plusieurs reprises des adjectifs en –âtre, qui ont une valeur nettement péjorative : jaunâtres blanchâtre verdâtre (l.17), noirâtre (l.62). [...]
[...] Zola multiplie ainsi le motif de la boîte, puisque dans cette sorte de boîte à laquelle s'apparente le passage, la marchande fait son commerce dans l'une des étroites armoires (l.23), qui contient elle-même des boîtes. enfin c'est le passage tout entier qui devient, sous la plume de Zola, un tombeau : celui-ci en a de prime abord souligné l'aspect rectangulaire et étroit, puis le fait qu'un des côtés est bordé d'armoires constituées de minces planches (l.24), et dans le dernier paragraphe, il emploie la métaphore de la galerie souterraine vaguement éclairée par trois lampes funéraires (l.55-56), avec un dernier adjectif qui participe explicitement du champ lexical de la mort et des funérailles, tout comme le mot caveau plus haut ; si bien que Zola donne somme toute du passage l'image d'une crypte mortuaire, les boutiques formant des caveaux latéraux. [...]
[...] Les marchands se contentent, pour tout éclairage, des maigres rayons que les becs de gaz envoient à leurs vitrines ; ils allument seulement, dans leur boutique, une lampe munie d'un abat-jour, qu'ils posent sur un coin de leur comptoir, et les passants peuvent alors distinguer ce qu'il y a au fond de ces trous où la nuit habite pendant le jour. Sur la ligne noirâtre des devantures, les vitres d'un cartonnier flamboient : deux lampes à schiste trouent l'ombre de deux flammes jaunes. [...]
[...] La synecdoque est un procédé qui consiste à désigner une réalité par une autre qui entretient avec la première une relation d'inclusion : la partie pour le tout, la matière pour l'objet, la couleur pour la chose. Exemples : un port rempli de voiles et de mâts (la partie pour le tout) ; les cuivres et les bois, porter un cuir, un jean (la matière pour l'objet); un blond, un blanc, un noir, un petit rouge (la couleur pour la chose). [...]
[...] Il est traversé par un public de gens affairés dont l'unique souci est d'aller vite et droit devant eux. On y voit des apprentis en tablier de travail, des ouvrières reportant leur ouvrage, des hommes et des femmes tenant des paquets sous leur bras ; on y voit encore des vieillards se traînant dans le crépuscule morne qui tombe des vitres, et des bandes de petits enfants qui viennent là, au sortir de l'école, pour faire du tapage en courant, en tapant à coups de sabots sur les dalles. [...]
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