Zola multiplie les détails morbides :
- "une clarté livide" (ligne 2) nimbe une chambre, suggérée mortuaire par le qualificatif réducteur "petite" (ligne 1).
- l'ambiance est noircie (couleur symbolisant la mort, le deuil et l'abandon) par le champ lexical de l'obscurité ("noirs", ligne 7 ; "ombre", ligne 10 ; "cave", ligne 10).
- le lit semble absorber le corps de Geneviève, comme une tombe, à tel point "qu'on ne sentait même plus la forme et l'existence d'un corps" (ligne 5) (...)
[...] Vous me demandiez Voulez-vous que je reste ? 15 Geneviève, l'haleine courte, les mains toujours errantes dans les plis de la couverture, ne la quittait pas des yeux. - Non, merci, je n'ai besoin de rien Je voulais seulement vous embrasser. Des pleurs gonflèrent ses paupières. Alors, Denise, vivement, se pencha, la baisa sur les joues, toute frissonnante de se sentir aux lèvres la flamme de ces joues creuses. Mais 20 la malade l'avait prise, et elle l'étreignait, et elle la gardait dans un embrassement désespéré. [...]
[...] D'abord, les parents avaient couché la malade dans leur propre chambre, sur la rue ; mais la vue du Bonheur des Dames, en face, la bouleversait, et ils avaient dû la ramener chez elle. Là, elle était allongée, si fluette sous 5 les couvertures, qu'on ne sentait même plus la forme et l'existence d'un corps. Ses maigres bras, brûlés de la fièvre ardente des phtisiques, avaient un perpétuel mouvement de recherche anxieuse et inconsciente ; tandis que ses cheveux noirs, lourds de passion, semblaient s'être encore épaissis et mangeaient de leur vie vorace son pauvre visage, où agonisait la dégénérescence dernière d'une longue famille poussée à 10 l'ombre dans cette cave du vieux commerce parisien. [...]
[...] En 1883, le onzième volume, Au Bonheur des Dames, plonge le lecteur dans le monde des grands magasins, innovation commerciale développée sous le Second Empire et annoncée dès 1820, lorsque les magasins commencent à supplanter les boutiques. Leur construction va alors de pair avec les travaux d'urbanisme du baron Haussmann et les intérêts des banques désireuses d'« organiser le commerce. Dans ce poème de l'activité moderne ainsi que le nommait Zola lui-même, l'auteur change complètement de philosophie, abandonne le pessimisme et ne conclut pas à la bêtise et à la mélancolie de la vie. [...]
[...] En bref, les forts survivent et les faibles disparaissent faute d'avoir su s'adapter à temps.[ - une dépossession totale Geneviève rend Le Bonheur des Dames responsable de la fuite de son fiancé avec une vendeuse de l'enseigne et la faillite du commerce familial : mais la vue du Bonheur des Dames, en face, la bouleversait, et ils avaient dû la ramener chez elle (lignes dans sa chambre sur la cour, sombre et hors du monde. - un contraste révélateur De fait, Zola accentue ici le contraste entre les deux jeunes femmes. Au cours de leur ultime étreinte, Denise embrasse sa cousine et est toute frissonnante de se sentir aux lèvres la flamme de ces joues creuses (ligne 19). [...]
[...] Une description réaliste Tout dans cet extrait décrit avec précision l'agonie de la jeune femme, le cadre comme les détails de la maladie. La chambre Zola multiplie les détails morbides : - une clarté livide (ligne nimbe une chambre, suggérée mortuaire par le qualificatif réducteur petite (ligne - l'ambiance est noircie (couleur symbolisant la mort, le deuil et l'abandon) par le champ lexical de l'obscurité (noirs, ligne 7 ; ombre, ligne 10 ; cave, ligne 10) - le lit semble absorber le corps de Geneviève, comme une tombe, à tel point qu'on ne sentait même plus la forme et l'existence d'un corps (ligne 5). [...]
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