Les Yeux d'Elsa, Fêtes Galantes, Louis Aragon, onirisme, réalisme, déclinaison picturale, poème structuré, quotidienneté, alexandrins, quatrains, décasyllabe, rime croisée, ballade, scène publique, monde burlesque, commentaire de texte
À première vue abscons, "Fêtes galantes", paru dans le recueil "Les Yeux d'Elsa" (1942), est un poème de Louis Aragon s'interprétant comme une déclinaison picturale des scènes auxquelles assiste le narrateur-poète. Par des procédés techniques constants, Aragon dessine les contours d'une vision burlesque de scènes publiques extrêmement diverses et farfelues qui, mélangeant tantôt folklore industriel et jeux de mots de circonstance, enveloppent ces tranches de vie d'une aura de simplicité et de quotidienneté.
[...] Cette particularité d'un « poème-ballade » est évidemment renforcée par le registre de langue employé par le poète. Loin d'être soutenu, il emprunte au familier par son utilisation abusive du « on » auquel l'usage aurait préféré le « nous » ; « morveux » (l. ou « lascars » (l. 11). Le fait que soit convoqué le verbe « voir » (« voit ») est également symptomatique de ce que le poète a voulu transmettre : une forme faussement enfantine, descriptive et surtout, dénué, en apparence tout du moins, de tout jugement de valeur. [...]
[...] Une progression temporelle et une dégradation axiologique A. De la tradition à la modernité La gradation et la progression des thèmes abordés par le poème se trouvent au cœur des scènes publiques auxquelles assiste le narrateur. Des « marquis sur des bicyclettes » et des « marlous en cheval-jupon » et semblent renvoyer à un temps lointain (« marquis » et « cheval-jupon ») conjugués toutefois à des caractéristiques de la contemporanéité (« bicyclettes » et « marlou », qui signifie « proxénète » en langage familier). [...]
[...] Les valeurs. Un monde où les « mots jetés à la voirie » côtoient « des mots élevés au pavois ». monde burlesque des « marquis sur des bicyclettes », formule oxymorique et des « marlous en cheval-jupon », tout aussi contradictoire (les marlous n'auraient-ils pas dû être sur les bicyclettes et les marquis sur les chevaux-jupon ouvre sur un renversement de La structure formelle permet une sorte de passage, de séparation entre l'ancien monde désormais dépeint comme incompréhensible et quasi onirique (les deux premières strophes) et le monde moderne (les deux dernières strophes) scindé au niveau de la troisième strophe du poème. [...]
[...] Mais il permet aussi de développer une permanence à toutes les scènes qui ne peuvent ainsi être lues sous une forme décousue : le poème les accole et leur donne une cohérence de fond. Cette cohérence est encore soulignée par les allitérations qui s'étirent et constituent une sorte de « bruit de fond » : le « m » (« marquis », ligne 1 ; « marlous », ligne « morveux », ligne ou le « v » (« voilettes », ligne 3 ; « voierie », ligne 5 ; « pavois », ligne Autre procédé stylistique sonore : la répétition syllabique. [...]
[...] de la confusion et de l'interchangeabilité (« on voit ici ce que l'on voit ailleurs », ligne 13). L'imperméabilité n'est plus possible, même pour le narrateur : ne s'efface-t-il pas au dernier vers pour « fuir » le poème « à la six-quatre-deux », à l'instar de son contemporain qui ne peut désormais que « fuir la vie à la six-quatre- deux » ? Aragon, par « Fêtes galantes », illustre tout le pessimisme qui porte la représentation de ses contemporains en pleine guerre mondiale. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture