Fables, La Fontaine, deux, chèvres, poésie, littérature
Situation :
Le douzième livre des Fables renoue avec la forme des contes, dont LF s'était séparé pour se consacrer aux Fables. Sous une forme merveilleuse et invraisemblable, la fable n'en reste pas moins politique et satirique : le symbole en est sûrement le diptyque « A Monseigneur le duc de Bourgogne » et « Le Vieux chat et la jeune souris », qui présente le poète en Chat et le dédicataire en Souris. La fable qui précède ce diptyque, « Les Deux Chèvres », XII, 4, est déjà toute imprégnée de ce thème politique et satirique, qui ne va pas sans une forme de comédie et de rire joyeux.
Caractérisation :
Fable parue en 1691, on ne connait pas de modèle ancien qui ait pu en donner la matière première. Peut-être le poète a-t-il été inspiré par une querelle de préséance survenue entre deux dames de la Cour. On peut y voir comment, dans un texte qui date de la fin de la vie de LF, le poète met un talent consommé de conteur au service d'une satire sociale qu'il intègre à une vision du monde mise à distance par l'humour.
[...] Le vers dans une formule sentencieuse, présage cependant la réussite de ces Chèvres : négation absolue qui ouvre le vers « Rien » qui refuse tout obstacle à ces chèvre, dont la périphrase « animal grimpant », avec le participe présent, montre leur mouvement et leur agilité, ce qui est aussi souligné par le présent de vérité générale (« peut »). On est donc en face d'un récit très vif monté à partir d'un incident banal. Mais outre la vivacité de la narration, c'est son intention satirique qui assure la réussite de cette fable Un exemple donné par les Chèvres du titre (vers 10 à 33). L'histoire commence au vers 10, qui reprend partiellement le titre : « Deux Chèvres donc s'émancipant ». [...]
[...] Le deuxième sens est privilégié dans les deux vers finaux : « Cet accident n'est pas nouveau / Dans le chemin de la Fortune ». Chute comique qui reprend les termes mêmes du prologue, pour le mettre à mal : « Fortune » est la reprise de « fortune » au vers mais elle a ici acquis une majuscule : la recherche de la fortune, sur le « chemin » (car même s'il ne semblait pas y avoir de chemin, « sans chemins, v.6, il y a celui de la Fortune) ne peut mener qu'à l'« accident » (jeu antithétique entre Fortune et accident : fortune comme chance, accident comme ce qui est contraire à la chance). [...]
[...] On peut y voir comment, dans un texte qui date de la fin de la vie de LF, le poète met un talent consommé de conteur au service d'une satire sociale qu'il intègre à une vision du monde mise à distance par l'humour. Plan : Du vers 1 à 9 : une formule sentencieuse sur l'intrépidité caprine Du vers 10 à 33 : un exemple donné avec « Les Deux chèvres » du titre ; place est faite à une tonalité héroï-comique, qui tente de lier l'intrépidité caprine avec leur effroi face au danger Du vers 34 à 37 : une chute cinglante qui invalide la formule sentencieuse du début Problématique : le poète met un talent consommé de conteur : un conte Un conte au service d'une satire sociale : illustration de la sottise humaine Une satire sociale qu'il intègre à une vision du monde mise à distance par l'humour : ton héroï-comique Comment le poète met-il un talent consommé de conteur au service d'une satire sociale qu'il intègre à une vision du monde mise à distance par l'humour ? [...]
[...] Leur naïveté est d'emblée soulignée avec l'incise : « Toutes deux ayant patte blanche » : l'expression rappelle « montrer patte blanche » (« Le loup, la chèvre et le chevreau », IV, en même temps qu'elle les décrit toute de blanche vêtues (candidus>blancheur). L'évocation de leur départ, au passé simple (« Quittèrent ») et dans un alexandrin qui exprime leur éloignement, laisse présagé un malheur, que leur naïveté ne laissait pas prévoir : d'autant qu'elles se séparent l'une l'autre (« chacun de sa part »). [...]
[...] A partir du vers 24 jusqu'au vers 28 1er hémistiche, l'histoire continue et narre leur avancée sur le pont : les multiples métonymies répétées dans des syntagmes figés (« pas à pas », « nez à nez ») discordent, dans la petitesse qu'elles suggèrent, avec le caractère héroïque qu'elles arborent (rime « aventurières »/ « fières »). L'affirmation de leu fierté, à caractère comique, les empêche de mener à bien leur projet : l'enjambement des vers 27-28, avec la formule « milieu du pont » au milieu du vers 27, miment le bousculement des deux chèvres pour ne pas céder ; reprise de « L'une à l'autre » comme combat entre les deux chèvres. Cependant, la reprise du passé simple consacre déjà leur échec (« voulurent » : volonté révolue). [...]
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