Gulliver, le célèbre voyageur imaginé par Jonathan Swift nous raconte son périple à travers les mers, au cours duquel il va se trouver confronté à différentes sortes de civilisations. Notre étude porte sur le chapitre d'ouverture de l'œuvre, qui présente le personnage de Gulliver, et les raisons qui le poussent à voyager.
Se créent, d'après le titre même de l'ouvrage, "Les voyages de Gulliver" (titre original : "Gulliver's travels"), divers horizons d'attentes liés à la tradition littéraire du récit de voyage, héritée du passé. Swift détourne ces horizons d'attente, et interroge le monde, par le biais de ce récit fictif. Nous pouvons nous demander sous quels aspects ce premier chapitre plonge à la fois le lecteur dans un monde imaginaire précis et transcrit en même temps des propos universels relatifs au monde.
Le chapitre premier du voyage à Lilliput, bien que plongeant rapidement le lecteur dans un l'atmosphère d'un territoire nouveau, s'ouvre sur une présentation du héros. Cette ouverture donne tout premièrement au récit des allures de roman réaliste. Le lecteur se trouve confronté à un personnage issu d'une classe moyenne ; personnage qui s'exprime à la première personne, qui décrit sa famille et son parcours.
[...] L'œuvre de Swift à une visée éducatrice ; les voyages de Gulliver permettent d'enseigner des savoirs généraux sur le monde. Ainsi, le langage apparait clairement comme une barrière entre Gulliver et les Lilliputiens. Celui-ci ne comprend pas les propos des petits hommes qui scandent des Hekinah Degul Tolgo Phonac Langro Dehul San ou encore Borach Mivola à moult reprises durant la rencontre. Ces propos sont liés à ceux de la compréhension et de la traduction j'ignorais alors ce qu'elle signifiait (ces mots et les précédents me furent ensuite répétés et traduits) Swift permet une analyse de la science du langage. [...]
[...] Gulliver se situe au croisement du réel et de l'irréel pour les Lilliputiens. Il représente à la fois la normalité et la monstruosité. Notons d'ailleurs l'allusion à la crucifixion du christ lors de l'attaque de Gulliver par les troupes Lilliputiennes : certains s'efforcèrent de m'enfoncer des lances dans les flancs Gulliver jouit de traits divins pour l'œil Lilliputien. Les habitants de Lilliput réagissent de façon confuse face à Gulliver, ils ne savent pas réellement comment le considérer. Ils montrent milles marques d'émerveillement et de stupéfaction devant ma taille et mon appétit. [...]
[...] Les Lilliputiens sont étranges pour Gulliver, mais Gulliver n'en est pas moins étrange pour eux. En effet, le voyageur effraie les petits hommes qui voient en lui un géant, mais ceux-ci l'admirent également. La soif de l'inconnu, de la découverte, entraine tous les êtres humains. Ainsi, on peut observer une attitude de retrait face aux mouvements de Gulliver ; les Lilliputiens s'enfuirent tous effrayés certains même se firent mal en sautant le long [des] côtes du personnage. Les petits hommes s'enfuirent à une deuxième reprise alors que Gulliver aurait voulu les saisir : Mais les créatures s'enfuirent une deuxième fois Et même lorsqu'ils font voyage avec Gulliver pour se rendre auprès du souverain, ceux-ci s'enfuient lorsque le géant éternue. [...]
[...] Le discours bascule de l'habituel vers l'impressionnant, l'effrayant même. Ainsi, Gulliver qui pensait être dans un espace inhabité se retrouve dans une situation troublante qu'il ne comprend tout d'abord pas. Le lecteur lui-même est transporté dans une nouvelle dimension. Les êtres auxquels Gulliver va être confronté sont différents de l'espèce humaine telle que la connaissent le prisonnier, et le lecteur. Ainsi, Swift met en scène des créatures humaines qui ne sont pas plus hautes que six pouces Il convient de noter la définition polysémique du mot créature qui peut, entre autres renvoyer à un être intermédiaire entre Dieu et l'Homme, ou bien également revêtir une connotation plus négative faisant allusion à des êtres émanant du Diable et des Puissances du Mal. [...]
[...] Notons à titre d'exemple l'utilisation de verbes tels que gésir rompre ses liens tenter de se libérer ou d'expressions comme un grand inconfort un effort violent, qui me fit grand mal ou encore c'est à peine si je pouvais tourner la tête sur environ deux pouces Non seulement ces termes traduisent l'inconfort dans lequel se trouve Gulliver, mais la suite renforce ce sentiment de stupéfaction et de frayeur puisque l'homme se fait attaquer : on me déchargeait plus de cent flèches dans la main gauche certains s'efforcèrent de m'enfoncer des lances dans les flancs L'homme geint de douleur et d'affliction Le sentiment de stupeur se transforme rapidement en frayeur, et douleur. La situation est certes difficile à vivre pour Gulliver, mais elle revêt également des caractéristiques étranges, presque merveilleuses. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture