Micromégas, géant qui habite l'étoile de Sirius, accomplit un voyage à travers l'univers en compagnie de son ami dont il a fait connaissance sur la planète Saturne. Tous deux arrivent sur la Terre le 5 Juillet 1737 et rencontrent un vaisseau qui transporte les membres d'une expédition scientifique .Micromégas et le Saturnien sont tellement grands qu'ils ont des difficultés à entrer en contact avec les hommes qui ne leur apparaissent pas plus gros que des "insectes". Pour les entendre ils inventent une sorte de porte-voix confectionnée avec un morceau de l'un des ongles de Micromégas et pour leur parler ils utilisent des "petits cure-dents" l40. (...)
[...] Ce passage illustre parfaitement le merveilleux propre à Micromégas. Voltaire s'amuse à jouer sur les différences de proportions entre des géants et des êtres minuscules comme Rabelais dans le Gargantua ou Pantagruel ou Les Voyages de Gulliver de Swift. Mais ce jeu n'est pas gratuit, il contient un enseignement philosophique qui vise à rabaisser la prétention des hommes à se croire les maîtres de la nature et de l'univers. Après avoir analysé l'humour du passage, surtout à travers l'opposition du grand et du petit, nous en dégagerons les principaux enjeux philosophiques. [...]
[...] Le point de vue du conteur: Voltaire s'amuse ainsi à mettre les hommes dans une fâcheuse posture. Il se plaît à décrire la panique qui les saisit lorsque Micromégas commence à parler: "Si jamais il y a eut quelqu'un d'étonné, ce furent les gens qui entendirent ces paroles. Ils ne pouvaient deviner d'où elles partaient. L'aumônier du vaisseau récita les prières des exorcismes, les matelots jurèrent, et les philosophes du vaisseau firent un système."l7 à l11.Voltaire dévalorise ainsi le religieux et les philosophes en les mettant sur le même plan que les "matelots " qui jurent .Tout le texte est ainsi rempli de la présence du narrateur, qui poursuit, à travers les jeux de la fiction et de l'humour ,une entreprise morale et philosophique. [...]
[...] L'éloge de la curiosité scientifique : Si Voltaire n'aime pas les spéculations philosophiques, il se passionne en revanche pour tout ce qui relève de la recherche scientifique, puisqu'il s'agit d'investigations concrètes universelles. Micromégas et son ami abordent ainsi les hommes en tant que savants. Pour eux les hommes sont des "insectes" étranges qu'ils vont s'employer à observer et étudier avec un regard d'entomologiste. C'est pourquoi ils adoptent le ton de l'enquête et de la recherche par le questionnement qui cherche à comprendre et à classifier. [...]
[...] Il s'agit de provoquer chez le lecteur une prise de conscience, qui le libère du poids des préjugés et des dogmes. Le point de vue de Micromégas est bien ici le point de vue de Sirius, c'est-à-dire un point de vue en surplomb, capable de prendre du recul et de la hauteur. Empêtré dans les détails et ses petits intérêts particuliers, l'homme s'enferme dans les préjugés et la violence. C'est en prenant de al distance qu'il peut relativiser ses opinions et mieux s'ouvrir à celles des autres. [...]
[...] Ce point de vue distancié, qui ouvre à la relativisation des opinions humaines et à la tolérance, définit aussi l'humour. L'humour est l'art de la distance qu'on est capable de prendre par rapport au réel. Il permet de mettre le monde en perspective et de convertir les contrariétés en plaisir. [...]
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