Cette rencontre avec le nègre a lieu dans un cadre spatio-temporel très précis. C'est le passage d'un lieu a un autre : les personnages quittent un monde merveilleux pour aller à Surinam et font une rencontre fortuite aux abords de la ville. Cette rencontre aura des conséquences dans le récit et dans le cheminement de Candide.
- Tout d'abord, Voltaire fait le portrait d'un homme déshumanisé et le présente dans une position et situation d'homme humilié : "un nègre étendue par terre".
- Ce nègre est réduit à des parts physiques de lui-même qui ont été amputées : "la jambe gauche et la main droite". Il a perdu son intégrité corporelle.
- Cette présentation sous le mode de l'amputation est faite pour suggérer l'horreur qui va être justifiée par le nègre dans les expressions parallèles "on nous coupe la main" et "on nous coupe la jambe" avec la répétition du verbe "couper" pour insister sur les horreurs que l'esclave a subi (...)
[...] Voltaire attaque les religieux. La critique est implicite dans la description de la misère et du discours du nègre. Cette dernière attaque les trois pôles du commerce, en premier l'achat de l'esclave, en second son travail et son exploitation et enfin les conséquences n'étant rendues possible qu'avec des maitres comme 4 Vanderdendur, qu'avec des mensonges de missionnaires et qu'avec la naïveté de la mère du nègre. Voltaire dénonce implicitement l'Europe qui mange du sucre a prix réduit, aux prix des jambes et des bras des esclaves comme on peut le voir dans l'expression C'est a ce prix que vous mangez du sucre L'achat du sucre est condamné par Voltaire. [...]
[...] L'ironie de Voltaire se retrouve dans les décalages. Décalage entre l'état et la neutralité de la narration et la situation de déséquilibre d'un homme. Décalage entre les interrogations quasi rhétorique de Candide et les réponses objectives et sans affectes du nègre. Décalage entre le sens de fameux et sa signification, le lecteur n'adopte pas le point de vue de l'esclave qui trouve que son maitre est normal et agit normalement. Décalage entre l'ordinaire et l'extraordinaire : l'esclave apparait dans une situation hors du commun qu'il justifie et qu'il généralise. [...]
[...] La scène se déroule avant l'entrée de la ville. Le personnage central est le nègre qui apparait dans ce chapitre. L'alternance de discours et de récit rend ce passage très vivant et donne une impression de vérité mise au service de la critique. Cette alternance permet cinq point de vue sur la situation du nègre : celui de Voltaire, celui du nègre sur lui-même, celui de la mère du nègre, celui de Candide et celui de Cacambo. Ce faisceau de point de vue donne de l'insistance à la critique. [...]
[...] Voltaire fait donc un portrait pathétique sans pathos et une description horrifiante résultant de l'action de l'Homme envers l'Homme. Le nègre peut presque être assimilé à un objet. Le discours de l'esclave est celui d'un Homme totalement résigné. La tonalité de son discours est neutre et sur le ton de l'acceptation. Le nègre donne l'impression au début d'accepter son sort et ce texte est informatif, il donne des renseignements. Les phrases de l'esclave sont brèves et sobres : J'attends mon maitre comme c'est l'usage et cela montre sa passivité, il se contente d'attendre. [...]
[...] Le déploiement de la réflexion de l'esclave qui répond aux questions de Candide est une réflexion d'apparence logique et de fausse évidence. On observe une symétrie de construction exprimée de manière quasi évidente Quand nous . quand nous et qui montre l'absence totale de révolte. De plus l'esclave généralise les deux cas avec le pronom nous et montre qu'il accepte d'être mutilé. Durant ce passage, Voltaire laisse le soin a Candide de faire parler le nègre, car auparavant c'était Cacambo qui parlait et qui était le plus entreprenant. [...]
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