Ruy Blas est un drame romantique, type de pièce qui connut un grand succès au 19e siècle, et qui offrait à l'époque un nouveau modèle d'action, différent de la comédie et de la tragédie, genres majeurs des 17e et 18e siècles. Il s'agit dans ce type d'action de mélanger les genres antérieurs, en créant des personnages qui pourraient appartenir à la comédie ou la tragédie, plongés dans une action très complexe qui s'éloigne radicalement de la règle des unités classiques. Cette pièce s'inscrit en outre dans le courant romantique, et signe le parachèvement de ce mouvement chez Hugo.
Ruy Blas fut publié pour la première fois en 1838, et prend pour héros Ruy Blas, un valet, au service d'un grand d'Espagne destitué, et qui déploie son intelligence et son éloquence, tant pour dénoncer et humilier une oligarchie accapareuse des biens de l'État que pour se montrer digne d'aimer la reine d'Espagne. Le monologue de la scène 2 de l'acte II prend place au moment où la Reine, après avoir surpris la manchette de dentelle tachée de sang de Ruy Blas, se plonge dans une rêverie amoureuse sur l'identité du jeune homme qui lui fait parvenir des lettres d'amour.
En quoi ce monologue scène participe-t-elle à l'élaboration du personnage de la Reine ?
[...] s'il l'avait voulu, j'aurais aimé le roi. / Mais il me laisse ainsi seule d'amour privée.) ( La Reine apparaît à la fois isolée et malheureuse, privée d'amour et de réconfort, et prête à tout pour connaître le bonheur et l'amour (d'où les v. 801-802 : Quand l'âme a soif il faut qu'elle se désaltère / Fût-ce dans du poison ! Transition : Le monologue permet de dessiner un portrait de la Reine, en soulignant les aspects les plus importants de son caractère, et en révélant ses aspirations. [...]
[...] Conflit entre piété et désir se lit en fait plus tôt dans le monologue, au v. 764-766, et laisse penser que la femme est avant tout une femme amoureuse incapable de résister à son désir : Je promets à mon Dieu, dont l'appui me délaisse, / De n'y plus retourner. J'y retourne sans cesse. ( Reine cherche à excuser sa faiblesse amoureuse par l'absence de secours de Dieu, mais elle ne semble pas avoir la force de caractère suffisante car c'est elle qui en réalité renonce à ses dévotions pour une rêverie amoureuse, délaissant ainsi Dieu + aveu de sa faiblesse v Hélas ! [...]
[...] Elle apparaît enfin comme une femme à la recherche de l'amour. Si ces appels pieux ne lui apportent pas le réconfort espéré, c'est sans doute parce que la Reine apparaît comme une femme qui recherche le secours de l'amour avant celui de la religion : son cri est déchirant v Mais enfin il faut bien que j'aime quelqu'un, moi ! : le moi rejeté en fin de vers, marqué par une ponctuation forte, vient redoubler l'expression du pronom personnel de 1ère personne et souligne la force de ce désir, qui semble indistinct (l'objet d'amour n'est pas fixé quelqu'un + force de la tournure impersonnelle il faut bien que : moins un désir qu'un besoin nécessaire. [...]
[...] Plan de l'explication I / Le monologue permet de dresser le portrait de la Reine 1. La Reine apparaît comme une femme isolée. Scène qui commence au moment où les suivantes de la Reine la laissent seule sur l'ordre de la camerera mayor : didascalie indique qu'elle est seule indication que répète le v qui met en exergue la situation isolée en encadrant l'attribut de deux ponctuations fortes Où la fuir maintenant ? seule ! Ils m'ont tous laissée. + reprise au v.805 en fin de monologue, mis en valeur par le tiret Mais il me laisse ainsi, seule d'amour privée. [...]
[...] 785) + idée de fatalité Elle se lève[ . ] puis se précipite sur la lettre, comme mue par une attraction irrésistible ( opposition construite aux vers 778-784 entre deux puissances, l'une maléfique et l'autre quasi-divine (jeune homme qualifié de ange v + opposition haine/amour v. 782), débouche sur l'image d'un destin incertain mais qui apparaît sombre (puisqu'il s'agit de sauver la Reine, v. 783) (au final, présence du registre tragique et de l'idée de destin annonce largement un dénouement malheureux, comme le souligne les vers 801-2 Quand l'âme à soif il faut qu'elle se désaltère / Fût-ce dans du poison ! [...]
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