Lecture analytique d'un extrait du chapitre 48 de l'Ecume des jours de Boris Vian intitulé "L'Enfer de l'usine".
[...] Le choc sourd de la plate-forme sur le butoir le tira de sa torpeur. Il sortit et gagna son bureau, une boîte vitrée et faiblement éclairée d'où il pouvait surveiller les ateliers. Il s'assit, rouvrit son livre et reprit sa lecture, endormi par la pulsation des fluides et les rumeurs des machines. Une discordance dans le vacarme lui fit soudain lever les yeux. Il chercha d'où provenait le bruit suspect. Une des jets de purification venait de s'arrêter net au milieu de la salle et restait en l'air comme tranché en deux. [...]
[...] Des gouttes se formaient sur la paroi, se détachant parfois lors d'une pulsation plus forte, et, quand une de ces gouttes lui tombait sur le cou, Chick frissonnait. C'était une eau terne et qui sentait l'ozone. Le passage tournait tout au bout, et le sol, maintenant, à claire-voie, dominait les ateliers. En bas, devant chaque machine trapue, un homme se débattait, luttant pour ne pas être déchiqueté par les engrenages avides. Au pied droit de chacune, un lourd anneau de fer était fixé. On ne l'ouvrait que deux fois par jour : au milieu de la journée et le soir. [...]
[...] Sa monomanie peut donc être considérée comme responsable, en un sens, du malheur qui arrive et lui arrive. S'il n'avait pas relâché son contrôle, il aurait pu éviter l'accident : Une discordance dans le vacarme lui fit soudain lever les yeux L'épisode est traité de façon assez macabre : les mains sont sectionnées leurs quatre mains droites étaient sectionnées au poignet le sang brûlé empeste l'atmosphère Le sang brûlait au contact du métal de la chaîne et répandait dans l'air une odeur horrible de bête vivante carbonisée La cruauté du travail en usine Quant aux cadavres, ils sont jetés dans le Collecteur Général : les brancardiers qui avaient empilé les quatre corps sur un petit chariot électrique et s'apprêtaient à la déverser dans le Collecteur Général. [...]
[...] Les quatre machines qu'il avait cessé de desservir, trépidaient. On les voyait remuer à distance, et, devant chacune d'elles, une forme s'affaissait peu à peu. Chick posa son livre et se rua au-dehors. Il courut vers le tableau de manœuvre des jets et baissa rapidement une poignée. Le jet brisé restait immobile. On eût dit une lame de faux et les fumées de quatre machines montaient en l'air en tourbillonnant. Il abandonna le tableau et se précipita vers les machines. Elles s'arrêtaient lentement. [...]
[...] Vian nous propose, dans cet épisode, une vision dramatique du monde du travail assez proche des Temps modernes de Charlie Chaplin. Cependant l'impression cauchemardesque est peut-être dominante et nous ne rions à aucun moment. Lecture Chick passa la poterne de contrôle et donna sa carte à pointer à la machine. Comme d'habitude, il trébucha sur le seuil de la porte métallique du passage d'accès aux ateliers et une bouffée de vapeur et de fumée noire le frappa violemment à la face. [...]
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