La première strophe évoque des personnages qui dansent au clair de lune. Le décor est planté mais on sait déjà que c'est dans l'âme qu'être et choses acquièrent progressivement une place prépondérante. Ce madrigal (petite pièce en vers, laudative, galante et précieuse) prend une tournure paradoxale (...)
[...] Mais tout ne reste que comédie, masques et déguisements. La troisième strophe place la nature au premier plan, les personnages ont disparu, comme par enchantement. Le clair de lune baigne le paysage d'une atmosphère de mélancolie et de tristesse qui traduit bien l'état d'âme de Verlaine. On note le caractère paradoxal de la construction du poème qui présente des personnages et ensuite un décor aussi vivant que les personnages. En effet, il est tour a tour calme, triste, il fait rêver et sangloter d'extase. [...]
[...] Dans "Clair de lune", le monde suggéré l'emporte sur le monde décrit. En effet, si le lecteur découvre que le paysage éclairé est celui des masques et des bergamasques, il prend rapidement conscience qu'il est avant tout celui des sentiments complexes et nuancés, des émotions et de tout un répertoire intérieur qui s'ouvre sur un univers sensible très particulier : celui de Verlaine. I. Le clair de lune, prétexte à un paysage intérieur La première strophe évoque des personnages qui dansent au clair de lune. [...]
[...] II Des personnages évanescents Les personnages qui peuplent la première strophe nous sont présentés par l'artifice de la synecdoque, "masques" pour "personnages masqués". Ces êtres sont donc réduits à la plus trompeuse des apparences. Les personnages n'ont pas l'air de croire à leur bonheur, déguisant leur âme comme ils ont déguisé leur corps. La mélancolie sous-jacente est suggérée par l'adjectif triste, accentuée par sa position en rejet puis minorée par l'adverbe quasi qui le précède. Les "déguisements" dont ils sont affublés rappellent les "masques" du vers 2. [...]
[...] Le thème choisi par Verlaine n'a donc rien de novateur. D'ailleurs ce poème inaugural des Fêtes galantes s'inspire de paysages ou de scènes de Watteau, de Boucher, de Fragonard et de bien d'autres artistes qui ont traduit, avec leur sensibilité, l'insouciance et la légèreté du XVIIIe siècle, et le caractère fictif de la fête. Pour Verlaine, la fête se trouve complètement imprégnée d'une tristesse et d'une mélancolie qui épousent a merveille le sentiment que l'on éprouve quand on se laisse aller à rêver devant un paysage de Watteau, par exemple. [...]
[...] Verlaine nous immobilise dans la contemplation d'un "clair de lune triste et beau", préféré au "clair de lune de Watteau" dans un premier écrit. La place de "triste" qui précède "beau" marque une priorité. Verlaine maintient la tristesse du décor et des personnages commencée dans les deux premières strophes mais la mêle d'une idée contraire, la beauté comme les romantiques. Si dans les deux premières strophes se manifestent la tristesse et la joie, l'extériorité divertissante de la fête et l'intériorité mélancolique des participants, dans le dernier quatrain la beauté et la gaieté des jets d'eau contrebalancent la tristesse du décor. [...]
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