Depuis le mariage d'Élisa en 1858, le chagrin d'amour de Verlaine le laisse inconsolable. La jeune femme a quitté la famille du poète chez qui elle vivait depuis sa naissance, pour vivre avec son époux à Lécluse, une commune du Nord de la France. Verlaine y passera les vacances d'été en 1862 et essaiera alors, en vain, de reconquérir la jeune femme (...)
[...] Un amour interdit Comme précisé ci-dessus, en 1862, Verlaine se rendit chez sa cousine mariée depuis quatre ans pour y passer les vacances d'été. Profondément épris et profitant des absences occasionnelles du mari, il a continué à lui faire des déclarations, probablement sous cette tonnelle qu'il évoque ou lors de longues promenades sentimentales dans la campagne (comme le rappellent d'autres poèmes). Il n'est donc pas surprenant que le dernier tercet fasse référence à une statue représentant la déesse Velléda (vers prêtresse germanique qui appuya la révolte contre Vespasien (69-70) du chef batave Civilis, et continua à résister après la soumission de celui-ci, mais fut capturée quelques années plus tard et emmenée à Rome. [...]
[...] Il est celui qui a lancé la notion de poètes maudits Poèmes saturniens est son premier recueil de poèmes, publié en 1866. La logique du recueil obéit en partie à une rhétorique du livre qui porte la marque de l'époque de sa composition, avec notamment la division en sections qui le rapproche évidemment du recueil de Charles Baudelaire, Les Fleurs du mal. Si Verlaine convoque Saturne, c'est en temps que planète tutélaire des mélancoliques, bien que le mot même de mélancolie n'apparaisse pas dans le poème (il donne toutefois son nom à la première section du recueil), non plus que le mot spleen trop évidemment associé à son emploi baudelairien. [...]
[...] II- La marque de l'impressionnisme Le thème du temps Tel un impressionniste, mouvement dont il se reconnaît, Verlaine procède par petites touches successives afin de privilégier les impressions fugitives. Ce qui est relativement paradoxal puisque le jardin est évoqué dans sa pérennité : Rien n'a changé (vers comme avant (vers mais qui souligne que la nature n'est pas victime du temps, seul l'humain (et donc le poète et ses sentiments) ou ses sentiments (la douleur atroce de l'échec a laissé place à la nostalgie) et ses œuvres (Dont le plâtre s'écaille, vers 13) le sont. [...]
[...] Par touches successives de couleurs et de décors, le lecteur semble se trouver devant un tableau impressionniste. D'emblée, l'adjectif étroite (vers suggère ce que le vers 2 confirme : le petit jardin et l'amène à le percevoir intime et familier (Rien n'a changé. J'ai tout revu, vers : les perceptions sensorielles Ce sonnet transmet le souvenir par de nombreuses perceptions sensorielles : d'abord visuelles (fleur, tonnelle, vigne ) puis auditives (avec notamment le zeugma des vers 7-8 : Le jet d'eau fait toujours son murmure argentin / Et le vieux tremble sa plainte sempiternelle et Les roses qui palpitent, vers et odoriférantes (l'odeur fade du réséda, vers 14) desquelles semble émerger la flore (le vieux tremble, Les roses, Les grands lys). [...]
[...] L'effet sonore du jet d'eau qui murmure sans gêner les déclarations sentimentales rappelle alors toute la maestria de Verlaine, un musicien du vers avec un recours permanent au vocabulaire musical. Conclusion Après trois ans laisse Verlaine apparaître comme un adolescent qui cherche à retrouver ses premières sensations amoureuses pour celle qui fut son inspiratrice et qu'il aimât éperdument. La tonnelle suggère alors des moments intimes agrémentés par la fraîcheur. Cependant, la statue de la Velléda rappelle cet amour interdit que sa muse ne partageait pas, ayant préféré un mari par convenance quatre années auparavant et auquel elle resta fidèle. [...]
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