Le Ventre de l'Atlantique, Fatou Diome, Barbès, ironie, narration, affabulation, immigration, colonisation
Le chapitre 5 du roman Le Ventre de l'Atlantique est centré sur le personnage de « l'homme de Barbès » qui raconte, en affabulant, son séjour dans la capitale parisienne. Son discours s'articule en deux temps. Tout d'abord, il décrit la ville de Paris dans un registre épidictique nettement marqué. La deuxième partie du discours de l'homme de Barbès traite des conditions matérielles de la vie en France.
[...] L'ironie du passage est donc d'autant plus forte que cet homme de Barbès, au début du chapitre, est comparé à Dieu : « c'était [ . ] le verbe innocent dont Dieu avait besoin pour recréer le monde ». L'ironie est double ici : d'une part, la comparaison entre la figure divine et le vrai visage de l'immigré est au désavantage de celui-ci, qui n'apparaît à la fin que plus ridicule. Mais d'autre part, elle met en exergue le fait que cet homme est un menteur : de même que Dieu est celui qui crée le monde, de même Moussa va « recréer » le monde dans ses histoires mensongères, et lui conférer un aspect qui n'a rien à voir avec son aspect réel. [...]
[...] L'écart entre les affabulations de l'homme de Barbès, et la réalité décrite par la narratrice, est un procédé ironique qui permet de tourner le discours du personnage en dérision. Le surnom même de ce personnage, l'homme de Barbès, est ironique : cette référence à un quartier parisien peut sans doute faire rêver les jeunes sénégalais qui ignorent tout de la capitale. Or Barbès est un quartier de Paris très populaire, sinon miséreux, où les immigrés africains se rendent en masse : carrefour du trafic de drogue, du marché noir et de la prostitution, c'est probablement l'endroit le plus mal famé de Paris intra-muros. [...]
[...] Le Ventre de l'Atlantique, Chapitre 5 - Fatou Diome (2003) - L'homme de Barbès : quelles sont les articulations de son discours ? Quelles ironies relevez-vous dans ce chapitre ? Le chapitre 5 du roman Le Ventre de l'Atlantique est centré sur le personnage de « l'homme de Barbès », qui raconte, en affabulant, son séjour dans la capitale parisienne. Son discours s'articule en deux temps. Tout d'abord, il décrit la ville de Paris dans un registre épidictique nettement marqué. [...]
[...] Mais le progrès social concerne aussi l'aide sociale aux plus démunis : l'homme de Barbès donne à voir une France si riche que la pauvreté n'y existe plus, et qu'il n'est plus besoin d'y travailler pour être fortuné. Ce long discours, principalement axé sur la richesse - préoccupation centrale des personnages dans tout le roman - se conclut sur une remarque moqueuse de l'homme de Barbès, qui affirme qu'il faut « vraiment être un imbécile pour rentrer pauvre de là-bas ». Mais cette remarque condense, comme on va le voir, toute l'ironie du chapitre puisque l'on comprend bien vite que c'est l'homme de Barbès lui-même qui est un imbécile. [...]
[...] Disons pour conclure que si l'ironie accable, tout au long du chapitre, le pauvre Moussa, mis sur les rails d'un mensonge duquel il ne peut plus sortir, elle ne manque pas d'égratigner non plus les Blancs « orgueilleux [qui] érigent un monument au moindre de leurs exploits ». Si, plus jeune, l'homme de Barbès s'est jeté dans la tourmente de l'immigration, n'est-ce pas à cause des mirages que l'orgueil des Blancs fait miroiter aux peuples de ce que nous appelons le « tiers-monde » ? Et n'est-ce pas cet orgueil même qui a poussé les Blancs à partir coloniser l'Afrique, pour la piller de ses ressources en matières premières ? L'ironie qui pèse sur ce personnage naïf en appelle, peut-être, une autre, plus sombre et plus terrible. [...]
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