Trouillot, "Rosalie l'infâme"

Résumé du document

Dans ce roman imaginé, trois générations de femmes esclaves dans les colonies françaises sont racontées au quotidien avec leurs peurs, leurs angoisses, leur combat à armes inégales et leurs espoirs vains.
La dernière génération est celle de Lisette, la narratrice, il y a aussi celle de sa mère, qu'elle n'a jamais connu, puis celle de sa grand-mère Grann Charlotte, de sa grand-tante Brigitte et de sa marraine Man Augustine.
Lisette est une jeune esclave qui a été élevée par sa grand-mère à la mort de sa mère puis par sa marraine à la mort de sa grand-mère (...)

Extraits

[...] Rosalie l'infâme, d'Evelyne Trouillot Introduction Que reste-t-il de l'esclavage ? Des dates, une journée de commémoration annuelle Toutes ces horreurs commises par l'espèce humaine ne sont elles pas en train de sombrer dans l'oubli ? Rosalie l'Infâme, premier roman d'Evelyne Trouillot paru en 2003, aborde ce sujet avec brio : Cette haïtienne née en 1954 à Port-au-Prince est partie très jeune pour les Etats-Unis où elle a fait ses études universitaires en langues et en éducation. Elle est depuis rentrée en Haïti où elle vit désormais depuis près de 20 ans à petits pas et à grandes foulées, avec beaucoup d'humilité et de détermination face au chaos Elle partage son temps entre la littérature et l'éducation et participe activement aux activités culturelles du pays. [...]

[...] Lisette écrit tout ce qu'elle ressent, émotionnellement mais aussi physiquement, ce qui donne l'effet de faire partie du roman, de ressentir les choses concrètement avec les personnages tellement il y a de détails dans l'écriture. Dès le début du roman, la narratrice nous invite à ressentir avec elle ses moindres mouvements : Je cours, indifférente aux quelques regards qui me réprimandent, aux murmures qui accompagnent ma course, répondant par un geste rapide aux recommandations bienveillantes. (Ligne page Tous mes sens sont alors occupés à multipliés à l'infini les mouvements de ses mains, les bruits de son désir, la puissance de son plaisir, les picotements de sa barbe sur ma poitrine, la tendresse de ses yeux, la frénésie de son sexe contre le mien (Ligne 23, page 21) Mes tresses se gonflent sous le poids des gouttes et l'eau coule dans mon dos Cette écriture fait appel à tous nos sens, aussi bien au toucher, à la vue ou encore à l'ouïe Le réalisme par la description physique et morale des personnages Nous avons remarqué que dans Rosalie l'infâme, un prénom est presque toujours suivi d'une description. [...]

[...] Conclusion Rosalie l'Infâme nous a donné une autre vision de l'esclavage, une approche plus réaliste et touchante. Nous nous sommes senties totalement impliquées dans le récit de Lisette, ce personnage très attachant. Comme si nous la connaissions, nous avons suivi son parcours, allant de ses hésitations, ses questions, ses doutes jusqu'à son choix pour la liberté. On peut reprendre la citation d'Evelyne Trouillot et dire que nous sommes rentrées dans l'histoire par la petite porte par la vie d'une esclave. [...]

[...] Ils portent aussi en eux les blessures des autres : Lisette, qui regarde un autre esclave se faire brûler sur le bûcher : Mes larmes se mirent à couler, mais je continuai malgré moi à suivre la démence des flammes. La chair calcinée se collait à mes pupilles, noircissait mes entrailles. Devant moi, la forme humaine se transformait en cendres. [ ] Je suis dans les derniers mouvements du nègre Paladin dont je n'arrive pas à reconstituer le visage avant que la terreur du bûcher grésillant le transforme en masque d'épouvante. [...]

[...] Elle a toujours vécu dans les Antilles, cela pourrait donc lui paraître normal si elle ne prenait pas de recul par rapport à son existence : en effet certains esclaves semblent accepter leur sort. C'est grâce à ces témoignages que la jeune esclave a une soif de liberté et de révolte. Lisette les fait parler à travers son récit, d'autres récits se mêlent au sien. Ces récits se glissent dans le récit de Lisette, lui-même inséré dans le roman d'Evelyne Trouillot et forment ainsi une sorte de mise en abyme. [...]