Mal d'amour, Ronsard, Ma douce Hélène, Hélène de Surgères, sonnets
Ronsard, le fondateur de la Pléiade, a 54 ans lorsqu'il rencontre la jeune Hélène de Surgères, demoiselle de compagnie à la cour de Catherine de Médicis. Elle vient de perdre durant la guerre civile l'homme dont elle était éprise. La reine invite Ronsard à la consoler. Il lui composera des sonnets restés si célèbres.
Dans l'un d'entre eux rédigé en 1578, dont l'incipit est « Ma douce Hélène, … », il lui fait une déclaration d'amour singulière où l'image de la femme se confond avec celles de grandes héroïnes antiques tout en reprenant le topos du « fou d'amour » médiéval.
Le sonnet : forme fixe, forme du sonnet héritée de Pétrarque qui a popularisé le sonnet au XIVème siècle dans ses Canzoniere.
[...] Texte 1 - Ronsard Ma douce Hélène Ronsard, le fondateur de la Pléiade, a 54 ans lorsqu'il rencontre la jeune Hélène de Surgères, demoiselle de compagnie à la cour de Catherine de Médicis. Elle vient de perdre durant la guerre civile l'homme dont elle était éprise. La reine invite Ronsard à la consoler. Il lui composera des sonnets restés si célèbres. [...]
[...] Nous examinerons d'abord l'expression du sentiment amoureux, puis l'apport des références antiques. L'expression du sentiment amoureux Une forme classique - Le sonnet : forme fixe, forme du sonnet héritée de Pétrarque qui a popularisé le sonnet au XIVème siècle dans ses Canzoniere - Dans ce sonnet on retrouve la muse inspiratrice (telle Laure était la muse de Pétrarque) : > dès le 3ème mot le prénom de la femme aimée est donné : Hélène (en référence à Hélène de Surgères) > la paronomase rapproche le nom de la femme et l' haleine c'est-à-dire le souffle, la femme étant donc inspiratrice de vie et aussi de poésie à l'auteur comme le renforce l'adjectif possessif ma > la femme est idéalisée : rythme ternaire vertu, connaissance et vigueur (v.3) - L'énonciation révèle un poème adressé à la femme aimée : > présence de nombreux adjectif possessif à la 1ère personne du singulier amené dès le premier vers par le l'expression apostrophant le sujet ma douce Hélène et deuxième personne du singulier (v.3,4) > mais absence de possessifs à la 1ère personne du pluriel révélant la non communication entre l'homme et la femme > c'est donc principalement de lui que parle le poète, c'est là que se situe la modernité du texte dans l'expression par le poète de ses propres sentiments et l'analyse de ces sentiments (au contraire du Lai de l'ombre où le poète se tient en retrait, commentant l'action et non la vivant) : le poète semble discourir avec lui-même : correction de son propos non question rhétorique terminant le poème Le poète va donc exprimer la souffrance de cette relation qu'on pourrait étymologiquement qualifier de passionnelle, faisant référence au topos médiéval du fou d'amour Les symptômes du mal d'amour - Le vocabulaire de la souffrance et de l'inquiétude est omniprésent : souffre peine douleur tourment souci - Les contradictions de l'état amoureux sont marquées par des antithèses qui montrent le déséquilibre qui mène au tourment les expressions sont nombreuses : > les vers 1 et 2 jouent sur l'opposition de température : la femme semble faire souffler haleine le chaud et le froid sur l'homme > heureux celui qui souffre (v.5) > heureuse la douleur,/ bienheureux le tourment (v.6-7, expression construite sur un parallélisme et sur l'enjambement) > opposition entre Hélène et Pénélope (cf. [...]
[...] - La référence à Pénélope trouve enfin un écho très particulier : lors de l'attente d'Ulysse, pour faire patienter les prétendants, Pénélope tissait une toile qu'elle détissait la nuit. La femme aimée est ainsi celle qui permet au poète de tisser la trame du texte, l'étymologie même du mot texte, textus reprenant cette idée de trame. On relève donc un bouclage du texte : le texte s'ouvre sur la femme inspiratrice et se referme sur l'image de la femme tisseuse de texte. La femme n'est donc, en quelque sorte, que le prétexte de l'écriture. [...]
[...] Le rapport au corps dénote une relation particulière, sans contact physique ; la souffrance du poète ne viendrait pas de la mort de la femme aimée mais de son refus d'aimer : un amour tragique. II- Les références antiques Hélène - Le texte se construit début par la paronomase d'Hélène et c'est autour de ce nom antique que le texte va se structurer révélant ainsi : > les deux premiers quatrains n'évoquent pas directement l'héroïne, ce n'est seulement qu'au début du premier tercet qu'il est fait référence aux Troyens (v.9) > cependant des indices sont déjà visibles dans le deuxième tercet : la structure heureux celui qui (v.5) traduction de la formule latine felix qui et le terme fatal renvoyant le poème et la relation à l'amour au domaine du tragique - Tout au long du poème, par le jeu des sonorités, on voit s'opérer un glissement d'Hélène (de Surgères) à Hélène (de Troie). [...]
[...] mythe) ; la référence aux Troyens (v.9) est d'ailleurs explicite et les flammes peuvent faire penser à la destruction de la ville > on entre donc dans le champ de l'épique, Ronsard faisant implicitement ici référence à l'Iliade d'Homère - Hélène, femme inaccessible pour le poète se transforme donc en héroïne tragique sujet du malheur de l'amour mais aussi sujet poétique. La douleur d'amour devient le moteur de l'écriture comme le laisse sous-entendre l'expression sujet de mon souci (v.9). Pénélope - Ronsard voit aussi en Hélène le personnage de Pénélope : > les vers 10 et 14 mettent en concurrence ces deux figurent, la coupe à l'hémistiche permettant de séparer ces deux visions > Pénélope est aussi le moteur d'une histoire à dimension épique : l'Odyssée d'Homère, mais elle est un moteur positif puisque c'est pour elle qu'Ulysse va naviguer de longues années, refusant même l'amour de divinités ; Pénélope est une figure de la fidélité car elle va résister aux assauts des prétendants > la femme est donc protéiforme : à la fois cause de l'amour mais facteur d'espoir et de fidélité - La comparaison est donc à la fois flatteuse et orientée : la femme Pénélope est qualifiée de sage mais sert aussi l'argumentation de l'homme en sous-entendant que la femme lui sera à jamais dévouée. [...]
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