Commentaire composé semi-rédigé du troisième chapitre de La chartreuse de Parme de Stendhal intitulé "Fabrice à Waterloo".
[...] Quelques instants après, Fabrice vit, à vingt pas en avant, une terre labourée qui était remuée d'une façon singulière. Le fond des sillons était plein d'eau, et la terre fort humide, qui formait la crête de ces sillons, volait en petits fragments noirs lancés à trois ou quatre pieds de haut. Fabrice remarqua en passant cet effet singulier ; puis sa pensée se remit à songer à la gloire du maréchal. Il entendit un cri sec auprès de lui : c'étaient deux hussards qui tombaient atteints par des boulets ; et, lorsqu'il les regarda, ils étaient déjà à vingt pas de l'escorte. [...]
[...] Pendant les Cent Jours, il brûle de rejoindre l'armée de Napoléon. Sa tante Gina del Dongo, âme également généreuse, l'aide à réaliser son dessein. Voilà donc Fabrice à Waterloo sur les traces de Napoléon. Texte Nous avouerons que notre héros était fort peu héros en ce moment. Toutefois la peur ne venait chez lui qu'en seconde ligne ; il était surtout scandalisé de ce bruit qui lui faisait mal aux oreilles. L'escorte prit le galop ; on traversait une grande pièce de terre labourée, située au-delà du canal, et ce champ était jonché de cadavres. [...]
[...] Mais il a aussi trop de lucidité pour ne pas admettre ce rappel à l'ordre, si bien justifié. Pour le maréchal Ney, Stendhal marque une fois de plus avec soin l'ordre des perceptions : anonyme, le maréchal n'est d'abord que "le plus gros de ces généreux". Tout le dialogue qui amène ensuite l'identification est dominé par l'humour dans le langage de Fabrice dont la légère fausse note constitue le verbe "gourmander" [réprimer avec vivacité = emploi littéraire et vieilli]. L'italique marque ici, comme habituellement chez Stendhal, l'emploi rare du mot. [...]
[...] Fabrice ne put retenir sa curiosité ; et, malgré le conseil de ne point parler, à lui donné par son amie la geôlière, il arrangea une petite phrase bien française, bien correcte, et dit à son voisin : Quel est-il ce général qui gourmande son voisin ? Pardi, c'est le maréchal ! Quel maréchal ? Le maréchal Ney, bêta ! Ah çà ! où as-tu servi jusqu'ici ? Fabrice, quoique fort susceptible, ne songea point à se fâcher de l'injure ; il contemplait, perdu dans une admiration enfantine, ce fameux prince de la Moskova, le brave des braves. Tout à coup on partit au grand galop. [...]
[...] Notre héros, fort humain, se donnait toutes les peines du monde pour que son cheval ne mît les pieds sur aucun habit rouge. L'escorte s'arrêta ; Fabrice, qui ne faisait pas assez d'attention à son devoir de soldat, galopait toujours en regardant un malheureux blessé. Veux-tu bien t'arrêter, blanc-bec ! lui cria le maréchal des logis. Fabrice s'aperçut qu'il était à vingt pas sur la droite en avant des généraux, et précisément du côté où ils regardaient avec leurs lorgnettes. [...]
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