Il s'agit du sonnet XLI du recueil des "Sonnets pour Hélène", du poète vendômois Pierre de Ronsard, dédiés à Hélène de Surgère, une femme de l'entourage de la reine. On sait que Ronsard, vers le milieu du XVIe siècle, fut le chef de file du groupe de poètes de la Pléiade, qui se proposait, en s'appuyant sur l'utilisation de thèmes antiques et de formes empruntées à la poésie italienne, de donner ses lettres de noblesse à la poésie en français.
"Les sonnets à Hélène" peuvent apparaître comme l'illustration de la démarche de Ronsard qui réutilise des éléments de la tradition poétique pour fonder une poésie nouvelle. C'est une oeuvre de vieillesse de Ronsard, publiée en 1578. on s'attachera particulièrement au sonnet XLI, qui constitue une invitation adressée à la femme aimée à rejoindre le poète.
[...] De plus, l'article défini à l'âge ainsi que le présent de vérité générale montrent que l'adresse personnelle prend un tour de maxime à valeur généralisante. Cette idée est développée dans les deux vers suivants: Pour trouver ton repos, n'atten point à demain : N'atten point que l'hyver sur les cheveux te vienne. Cela rappelle d'autres poèmes de Ronsard, comme l'Ode à Cassandre Mignonne, allons voir si la rose . ou encore le sonnet à Hélène 43 Quand vous serez bien vieille . [...]
[...] On verra comment cette invitation à fuir la cour et à adopter une vie simple finit finalement par s'inscrire dans la poésie amoureuse de Ronsard. Le premier quatrain apparaît comme une invitation à abandonner un état. Dès les premiers vers, le thème de l'invitation apparaît: Laisse de Pharaon la terre Egyptienne, Terre de servitude, et vien sur le Jourdain : Avec Laisse c'est un impératif qui ouvre le sonnet et qui introduit le thème de l'invitation pressante, presque un ordre. L'impératif introduit également un destinataire, Hélène, à qui sont dédiés le sonnet et le recueil. [...]
[...] Le vers 14 constitue la chute du sonnet: Je seray ton Orphee, et toy mon Eurydice. Il apparaît finalement que cette invitation à une vie plus honnête et modeste était en fait une invitation amoureuse déguisée. On remarque l'apparition du je qui ouvre ce vers. Il n'était pas présent jusque-là dans le poème, bien que sous-entendu dans l'emploi des impératifs qui induisent un destinataire, mais aussi un auteur de l'ordre. Ici, le Je du poète se révèle pleinement. On remarque que les deux hémistiches de l'alexandrin sont construits de façon symétrique avec les pronoms personnels sujets Je et toy et les adjectifs possessifs ton et mon qui se répondent. [...]
[...] Avec et vien sur le Jourdain on voit qu'à la terre égyptienne, Ronsard oppose la terre promise, la Palestine, évoquée ici par la métonymie avec sa rivière, le Jourdain. L'opposition est renforcée par la disposition du vers puisque le premier hémistiche de l'alexandrin est occupé par l'Égypte et le second par la terre promise. Cette terre apparaît comme un pays de liberté, la solution aux problèmes de sa destinatrice. Dans les deux vers suivants, Laisse moy ceste Cour, et tout ce fard mondain, Ta Circe, ta Sereine, et ta Magicienne. [...]
[...] Le vers 11 insiste encore sur les mensonges de la cour: Tu vois la vertu fausse, et vraye la malice. On remarque le chiasme la vertu fausse et vraye la malice renforcé par la disposition de part et d'autre de la césure. Il oppose le vrai et le faux, le bien et le mal, avec l'idée que la vertu y est feinte et que le mal y est bien présent, bien que caché. Ce premier tercet insiste donc sur la description de la cour comme lieu de perdition, où l'on est esclave des apparences et des mensonges, comme dans le premier quatrain où il présentait ce lieu comme Terre de servitude On remarque que pour avoir les douze syllabes de l'alexandrin, il convient de prononcer vraye en deux syllabes. [...]
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