Après avoir retranscrit les mémoires de la mère de Max Ferber, relégués par ce dernier, le narrateur raconte sa décision de partir sur les traces de l'enfance et de la jeunesse idyllique de Luisa. Il fait donc le récit de son enquête dans les villages où Luisa Lanzberg a vécu durant son enfance et sa jeunesse : Steinach et Kissingen. L'enquête s'annonce vaine et désespérante, puisque l'arrivée du narrateur à Kissingen est marquée par une vision fantomatique de la ville. Cherchant des traces du passé, le narrateur découvre une ville qui n'a rien à voir avec celle que Luisa relate dans ses mémoires. Placée à la fin du dernier récit de vie, cette étape est la dernière de l'investigation autour de la vie de Max Ferber. Cette position, annonçant l'aboutissement du dernier récit d'enquête, lui confère un caractère décisif dans la section et dans l'oeuvre, accentué par le fait qu'il se démarque aussi par la tournure que prend l'enquête. Ce passage est marqué par l'identification de manière plus accentuée du narrateur à l'auteur et pour la première fois (...)
[...] Le biographe lui aussi est un solitaire incapable de trouver de réponse. La reconstitution même des vies par l'écriture est douloureuse, et dès lors cette enquête se montre comme métaphore du travail du biographe, avançant à tâtons et dont le travail, la cristallisation par l'écriture, ne peut qu'être lacunaire ou fallacieux. Il s'avère finalement que le biographe ne peut représenter qu'une perte, et que les biographiés apparaissent comme d'éternels absents. * * * Ce récit de la dernière enquête du recueil, apparaît comme un dénouement pessimiste qui clôt le récit sur le cimetière, lieu de mémoire et de mort, et montre ainsi, à travers l'expression de la douleur que provoque chez le narrateur l'effet de l'amnésie allemande, que la mémoire ne peut être que celle de l'absence. [...]
[...] * Le récit de cette enquête décisive met en scène l'échec d'un dénouement. Le narrateur ne retrouve du passé que la trace de la perte, et la visite à Kissingen est soldée par l'échec et par la révélation de l'impossibilité de conclure l'enquête. Le dénouement, attendu par cette enquête finale et difficile, s'évanouit, évincé par l'absence. La photographie montrant l'Office de tourisme illustre l'absence de l'ancienne synagogue et pointe la perte. Kissingen ne montre d'abord aucune trace du passé recherché, et quand le narrateur en découvre, elles s'avèrent être les traces de la disparition et de la perte. [...]
[...] Le drame personnel se heurte alors à l'indifférence contemporaine. Le récit, en opposant le passé au présent, montre une destruction. L'enquêteur découvre un passé laissé à l'abandon et dont il ne reste que des ruines. Dans le présent de l'enquête, le cimetière juif apparaît comme quasiment invisible et fermé à clés, ce qui montre qu'il n'est pas ou peu visité. De plus, ces clés, pourtant dûment étiquetées ne sont pas les bonnes, ce qui révèle une certaine hypocrisie de cet étiquetage. [...]
[...] Autour de la station thermale, il est frappé par l'étrangeté des vieux passants, et il s'imagine ensuite passer le reste de [s]on existence à Kissingen au milieu de ces figures repoussantes. Au café, son attention se porte sur ce qu'on appelait l'éphéméride et sur les micro-biographies qui y apparaissent, et plus précisément celles d'inconnus évoqués dans la rubrique Nos disparitions où la vie d'un certain M. Michael Schultheis est résumée, dans un effet légèrement burlesque, par ses activités, l'image que l'on avait de lui, son objet d'affection et par l'âge de sa mort. [...]
[...] Puis, donnant enfin une consistance à son enquête, il cherche à visiter l'ancienne synagogue et le cimetière juif. C'est là que le parcours prend des allures de chasse au trésor. Il doit d'abord trouver, après un assez long jeu de piste dans un bureau relégué au fin fond d'un couloir un fonctionnaire pour lui indiquer le chemin. Le premier échec survient alors lorsqu'il apprend que la synagogue n'existe plus. Puis le fonctionnaire lui indique la marche à suivre pour se rendre au cimetière juif à la manière d'un parcours d'orientation, comme s'il s'agissait de trouver une chose peu visible et placée à un endroit très précis : il fallait, à partir de l'hôtel de ville, marcher mille pas vers le sud, en ligne droite Il lui donne enfin des clés, révélant un autre obstacle qui est la fermeture du cimetière. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture