La scène de l'écriture bénéficie dans le roman de Boujedra La Macération (1985) d'un traitement exceptionnel. Foyer de la narration et séquence importante du récit, elle est l'objet d'un retour incessant qui lui confère une présence particulièrement envoûtante. C'est dans cette scène spéculaire, écrite selon la technique de la mise en abyme, que nous pensons que se joue, la signification de l'œuvre romanesque de Boujedra, dans sa double dimension fantasmatique et poïétique.
[...] ) Je restais alors immobile des heures durant, fixant les branches du mûrier dont les rameaux de devant étaient comme peints en vert ( . (p. 36). Poussant dru, ce mûrier vigoureux qui fascine le narrateur finit par envahir sa chambre :"l'exubérance du mûrier a presque envahi l'espace intérieur de la chambre" (p. 44). Ainsi, succombant à l'inexplicable attraction qu'exerce sur lui le mûrier, le narrateur finit par se détourner de l'espace familial et s'identifier à l'arbre devenu une partie de lui-même : " . le jardin se transforme alors en une fantasmagorie prodigieuse. [...]
[...] C'est sous le signe de l'apaisement et de la détente que se déroule ce retour du narrateur. Il est accueilli avec une admiration respectueuse par "La maîtresse juive du patriarche". Et c'est d'ailleurs avec beaucoup d'humour qu'il évoque l'aura de "théologien illustre dont il jouit auprès de la vieille femme : . ) - et maintenant - s'entêtant à s'intéresser à ma vie professionnelle, à mes travaux d'écrivain, leur donnant de l'importance, comme, si au fond d'elle - même, elle croyait que j'avais des dons surnaturels . [...]
[...] Ainsi, la chambre du narrateur devient le théâtre où se déroule la scène de l'écriture, moyen de dévoilement et de création. Le narrateur apparaît rarement ailleurs que dans sa chambre, assis dernière son bureau, écrivant ce passé qui surgit par bribes j'écris et me souviens . " (p. 38) déclare-t-il comme si l'écriture, les mots étaient les seuls moyens d'explorer "l'archéologie insondable de la mémoire"(p. 11). La scène de l'écriture se déroule dans un décor sobre, dépouillé : un bureau (p. une lampe de bureau un encrier antique que le père avait acheté au bazar de Téhéran " . [...]
[...] ) ils donnaient donc (les oiseaux) l'impression qu'ils portaient dans leurs yeux toutes les larmes du monde, dont celles de ma mère, qui s'étaient figées, restées suspendues, immobilisées alors qu'elle était assise sur sa valise à la gare du Khroub, à une heure tardive de la nuit alors qu'il régnait un froid glacial et une obscurité profonde ( . (p. 57). La projection d'un souvenir qui remonte à l'enfance du héros sur un élément du paysage nocturne formant le cadre naturel de la scène de l'écriture, se justifie par une certaine similitude entre la situation de la mère et celle des oiseaux : ils passent la nuit dehors, par un temps frais. De plus, ils ont en commun certains traits physiques et psychologiques : fragilité et mélancolie. [...]
[...] La scène de l'écriture dans la macération de Rachid Boujedra ( ) il ne faut pas imiter la vie, il faut travailler comme elle. Sentir pousser ses branches. Ses branches à soi, sûr, pas à elle. André Malraux, la Tête d'obsidienne La scène de l'écriture bénéficie dans le roman de Boujedra La Macération[1] (1985) d'un traitement exceptionnel. Foyer de la narration et séquence importante du récit, elle est l'objet d'un retour incessant qui lui confère une présence particulièrement envoûtante. C'est dans cette scène spéculaire, écrite selon la technique de la mise en abyme, que nous pensons que se joue, la signification de l'œuvre romanesque de Boujedra, dans sa double dimension fantasmatique et poïétique. [...]
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