Guillaume Apollinaire, "Alcools", "Saltimbanques" : analyse

Résumé du document

Les deux premiers quatrains ont opposé nomadisme et sédentarité avant de s'achever sur une tentative de médiation avec l'image des arbres fruitiers. Le dernier quatrain fait apparaître le champ lexical de la fête, suggérant la nécessité de lutter contre la monotonie de la vie du village (...)

Extraits

[...] Dans le second quatrain, la même assonance semble être une invitation aux saltimbanques pour qu'ils partagent cette vie : Les autres suivent en rêvant Chaque arbre fruitier se résigne Quand de très loin ils lui font signe II- L'opposition de deux modes de vie Des champs lexicaux révélateurs - Les nomades sont associés au champ lexical de la nature (plaine, vers 1 ; jardins, vers 2 ; arbre fruitier, vers 7 ; L'ours et le singe animaux sages, vers 11) - Les citadins sont associés au champ lexical de la civilisation : .l'huis des auberges grises (vers souligne fortement l'absence de spiritualité. En effet, le mot huis représente une porte fermée, les auberges font allusion à leur fonction habituelle de débit de boissons alcoolisées afin d'y noyer dans l'oubli la monotonie de cette vie, alors que l'adjectif grises suggère la tristesse .les villages sans églises (vers référence évocatrice de lieux sans joie puisque privés de la candeur originelle .sous (vers 12). Le terme se rapporte à la notion de matérialisme, en opposition avec la spiritualité. [...]

[...] ÉTUDE ANALYTIQUE Introduction Guillaume Apollinaire (1880-1918) est l'un des plus grands poètes français du début du XXe siècle, inventeur du calligramme (terme de son invention désignant ses poèmes écrits en forme de dessins et non de formes classiques en vers et strophes), chantre du cubisme et précurseur du surréalisme dont il a forgé le nom. En 1913, à l'âge de 33 ans, il publie son premier recueil de poèmes, Alcools, qui fait écho aux Paradis artificiels de Baudelaire. La légende dit que c'est au dernier moment avant la mise sous presse qu'Apollinaire décida de supprimer totalement la ponctuation d'Alcools. Outre qu'elle favorise une diction plus fluide, elle produit également des ambiguïtés riches de sens. [...]

[...] Le champ lexical du mouvement On relève ainsi : - la mise en abyme de la mouvance des baladins Ils évoluent Dans la plaine (vers et sont donc en relation avec un espace ouvert, illimité et quelque peu imaginaire. Leur opposition est marquée par les villages (vers univers clos qui crée un climat d'hostilité et de tristesse, souligné par la coloration triste (des auberges grises, vers et la carence (sans églises, vers 4). - l'emploi décalé du verbe éloigner (S'éloignent au long des jardins, vers 2). En effet, son utilisation inhabituelle met en évidence l'absence de point de départ. [...]

[...] Ainsi, ce recueil est une synthèse de la tradition lyrique puisqu'il en traite le thème dominant : l'amour (Apollinaire y chante la femme aimée) et de la modernité avec donc, entre autre, l'absence de ponctuation. Le recueil devait à l'origine s'appelait Eau de vie ; Alcools, moins directement transparent, qualifie métaphoriquement la conception de la création poétique de l'auteur, ivresse poétique mais aussi saveur amère de l'alcool et par extension de la vie. La poésie est en effet envisagée comme alchimie, distillation de l'expérience vécue. [...]

[...] Néanmoins, Apollinaire témoigne cette fête comme éphémère, car les nomades, sur lesquels elle repose, ne sont que de passage (S'éloignent au long des jardins, vers car, opposés à la sédentarité, leur voyage ne s'arrête pas là. Conclusion Ce poème d'Apollinaire permet d'envisager deux courants littéraires : - il est en relation avec la littérature baroque dont on retrouve les thèmes de la mobilité, de l'inconstance et de la fuite, illusions propres à l'art baroque - du point de vue idéologique, il se rapproche du romantisme avec la nostalgie d'un paradis perdu et l'idée que tout se dégrade à partir de ce point d'origine. [...]