Diderot, Salon de 1767, critique d'art, désinvolture, discours enchâssé, La bonne aventure, Jean-Baptiste Le Prince
"Vous commenterez le texte de Diderot (document 1), dans son rapport au tableau de Le Prince (document 2 en annexe). Vous serez sensible à la composition très originale de ce compte rendu, en montrant, par exemple, que la description ne débouche pas sur une évaluation du
tableau, mais cède plutôt la place à l'anecdote, au récit".
[...] Il commence par une critique d'art tout en manifestant son désintérêt pour l'oeuvre en question, puis digresse brutalement sur une anecdote personnelle, passant ainsi d'un sujet noble (l'art) à un sujet trivial. Mais c'est paradoxalement au moment du récit trivial que son style se déploie et que le texte devient véritablement intéressant et dynamique. L'auteur montre ainsi son goût pour l'anecdotique, mais il s'érige également en auteur de la spontanéité et de l'authenticité, ne craignant aucunement les sujets bas, et tâchant de les élever à leur juste valeur. [...]
[...] Enfin, sa désinvolture finit par devenir explicite : « Et puis, où est l'intérêt de toute cette composition ? » A la fin du texte, il revient sur le tableau pour en faire une critique plus explicite : « Ici, les têtes sont mal touchées ; et les vêtements lourds ». A la désinvolure succède le blâme, le jugement de valeur. Selon l'auteur, le tableau n'est visiblement pas une réussite. D'un point de vue générique, le texte semble donc se situer clairement du côté de la critique d'art. Pourtant, cela pourrait bien n'être qu'un prétexte au récit enchâssé. Le genre du texte est assez insaisissable. [...]
[...] La porosité générique est donc ici féconde puisqu'elle permet d'éclairer le véritable enjeu du texte : non pas l'oeuvre d'art, mais plutôt l'enthousiasme et le badinage d'une anecdote spontanée. Cet amour de la spontanéité et de l'authenticité visible dans le texte fait de Diderot un éminent représentant de ce que le XVIIIème siècle nomme « honnête homme », à savoir un modèle de modération, d'humour, de sociabilité et de courtoisie. Tout d'abord, une grande partie du texte est un discours adressé à un public, donnant ainsi l'impression que l'auteur s'adresse directement au lecteur. [...]
[...] Salon de 1767 (à propos de La bonne aventure de Le Prince) - Diderot (1767) - Comment Diderot parvient-il à créer un texte original et séduisant, tout en s'érigeant lui-même en modèle de l'« honnête homme » ? PLAN Une critique d'art désinvolte une description mécanique la désinvolture de l'auteur Une porosité générique : le récit enchâssé un récit dynamique le récit enchâssé : le réel intérêt de l'auteur ? Un modèle de l'honnête homme un discours adressé Diderot, modèle d'homme modéré et courtois Dans ses différents Salons, Diderot propose des compte-rendus d'expositions de peinture auxquelles il a assisté. [...]
[...] Diderot lui-même se met en scène dans le rôle de l'honnête homme. En effet, il fait preuve de modération, en ne faisant ni l'éloge ni le blâme radical du tableau mais en reconnaissant ses qualités et ses défauts : « Mêmes qualités et mêmes défauts qu'aux précédents ». Il s'adonne également à l'humour de par la digression anecdotique et sa conclusion humoristique : la voyante n'a fait que prédire un fait dont elle est à l'origine. Au moment du dialogue dans le récit, on imagine très bien l'honnête homme en pleine action, mimant la scène et la rejouant pour amuser ses compagnons. [...]
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