Une saison en enfer, écrite par Rimbaud en 1873 présente un poète damné qui porte le poids d'un baptême chrétien qu'il n'a pas voulu. L'histoire raconte la déchéance d'un jeune poète qui, ayant fait le choix de la révolte contre la société et de la négation enragée des valeurs traditionnelles, se trouve projeté aux limites de la folie et à l'article de la mort. Adieu constitue le dernier poème de ce recueil et est en quelque sorte son épilogue. Dans ce poème en prose poétique, Rimbaud revient sur sa tentative de voyance en la condamnant. Ce constat d'échec succède cependant à l'espoir de repartir vers une nouvelle aurore.
En quoi ce poème est-il la fin d'une saison ?
[...] Ce retour à la réalité, sa lucidité retrouvée, Rimbaud peut alors porter un jugement critique sur son expérience de la voyance. Ainsi, en revenant sur ce monde fantasmé qu'il a créé, et en le répudiant, Rimbaud accède à une véritable renaissance. À côté de ce monde réel qu'il a vécu, Rimbaud place le monde rêvé, pur, lumineux. La barque sordide devient alors un "vaisseau les bas- fonds et les pauvres dévorés par la peste sont remplacés par des plages sans fin et des foules en liesse. [...]
[...] Le poète est seul. Il reprend d'ailleurs à contre usage toute l'imagerie chrétienne du damné. En effet, il se présente comme un contre christ et a recours à ce que Paul Claudel appellera la note édénique La fin de la saison marque donc son retour sur les erreurs commises, ainsi que la fin des illusions passées, mais aussi la fin de deux épreuves quelque peu paradoxales. Tout d'abord celle de la damnation, mais aussi celle de la passion qui ne peut être chez Rimbaud qu'une contre crucifixion. [...]
[...] Cette barque à l'image de l'errance de Rimbaud tourne dans l'eau sans but précis. L'utilisation de la première personne du pluriel notre montre l'universalité de son expérience : ce n'est pas seulement lui, mais l'humanité dans son ensemble qui est condamnée à la misère. L'omniprésence de la mort dans toute l'évocation de cette saison passée, montre la peur du poète de devenir comme tous ces millions d'âmes un inconnu parmi d'autres. En effet, Rimbaud insiste sur le caractère anonyme des individus après la mort, avec la périphrase étendu parmi les inconnus sans âge, sans sentiment Cette peur est aussi soulignée par la rupture de rythme entre les phrases où la mort est évoquée et, juste après, le retour au présent. [...]
[...] En effet à la différence du damné qui est condamné à l'enfer éternel, Rimbaud en est sorti. Adieu constitue donc bien la fin d'une saison, marquée par le rejet de l'enfer et de sa cause principale : l'expérience de voyance. En effet, le poète rompt ici complètement avec son ambition de poète démiurgique, prométhéen décrit dans la Lettre du voyant de mai 1871. Il revient sur ces fautes et demande même l'absolution, en tendant vers une nouvelle aurore La damnation de Rimbaud n'est pas éternelle ce qui semble constituer un paradoxe qui en fait n'en est pas un. [...]
[...] On peut dès lors se demander si Rimbaud arrivera à se détacher véritablement de la voyance, dont on voit encore les traces dans les Illuminations. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture