Rousseau est fort habile ici : tous les traits par lesquels il s'était chargé sont maintenant repris et se trouvent fournis des justifications de sa conduite et autant de circonstances atténuantes. Paradoxalement, d'accusé, Rousseau passe pour finir au rôle d'accusateur (...)
[...] Lecture analytique Confessions - Rousseau Le ruban vole ID FDL : 526 Confessions de Rousseau : Le ruban vole Sommaire Le récit II) Le commentaire III) Le plaidoyer Analyse Les Confessions : LE RUBAN VOLE Cette fois, voici une des confessions de Rousseau qui justifie vraiment le titre de l'ouvrage. Il ne se contente pas de nous raconter sa vie : il se confesse, et même, il s'absout (il se "pardonne"), ou du moins, selon le mot d'André Maurois, il "bat sa coulpe" vigoureusement en sachant que le lecteur l'absoudra. [...]
[...] Rousseau a marqué fortement au cours du récit le contraste entre sa propre obstination et la vertu digne et généreuse de Marion. Elle est parfaite : elle est l'ange assailli par un véritable démon. Mais ce jeu d'hypothèses gratuites et d'antithèses finit par infléchir assez hypocritement la situation réelle : la victime, suppose Rousseau, à sans doute connu bien des déboires en son existence matérielle. Mais Rousseau semble considérer que cela n'est rien au prix des souffrances morales que lui-même a connu dans sa vie. [...]
[...] Le portrait moral doit rendre la victime intéressante : jeune, jolie, innocente, honnête, saine fille des montagnes . Chez Marion (déjà pure héroïne de mélodrame), on notera la correspondance entre le physique et le moral. Inversement, tous les détails contribuent à noircir le jeune voleur. Enfin, tout doit minimiser le larcin et le préjudice, le désordre dans lequel est plongé la maisonnée. Quand au ruban, il est petit et vieux. II. LE COMMENTAIRE Rousseau examine les conséquences de l'acte de ce vol successivement pour Marion et pour lui ("j'ignore ce que devint . [...]
[...] A en croire Rousseau, l'excès d'intérêt qu'il portait à Marion le poussait à la charger du vol lorsqu'elle fut présente à ses yeux. Si vraiment quelques penchants le portait vers elle, Marion dut être le dernier objet sur lequel il dut s'excuser. Quel rapport entre avoir songé donner le ruban à Marion et la laisser accuser du larcin ? Il n'en demeure pas moins que pour un individu aussi stupide qu'il se prétend et n'ayant que l'esprit de l'escalier, Jean-Jacques manie passablement l'art de décharger sa responsabilité : toute la faute en définitive incombe à ces grandes personnes raisonnables, habiles, cultivées qui n'ont pas su le prendre, le guider et le délivrer de son aveu ("tout était si facile à arranger"). [...]
[...] Malgré la grâce et la vivacité du récit, une gène subsiste après la lecture de ces pages. On tiendra compte à Rousseau de ses bonnes intentions, de son courage. Son mea-culpa semble sincère et sans doute aussi le remords qu'il affiche, mais cette confession publique fournit des armes contre lui : son insistance à s'appesantir sur un si minime incident devient suspecte. Par un trop habile plaidoyer, il rejette à posteriori toute la responsabilité sur autrui et n'endosse que l'acte matériel. C'est une singulière appréciation morale des délits et des devoirs. [...]
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