Dans l'épisode du ruban volé, le titre de l'ouvrage de Rousseau,
[...] On voulut savoir où je l'avais pris. Je me trouble, je balbutie, et enfin je dis, en rougissant, que c'est Marion qui me l'a donné. Marion était une jeune Mauriennoise dont madame de Vercellis avait fait sa cuisinière quand, cessant de donner à manger, elle avait renvoyé la sienne, ayant plus besoin de bons bouillons que de ragoûts fins. Non seulement Marion était jolie, mais elle avait une fraîcheur de coloris qu'on ne trouve que dans les montagnes, et surtout un air de modestie et de douceur qui faisait qu'on ne pouvait la voir sans l'aimer; d'ailleurs bonne fille, sage, et d'une fidélité à toute épreuve. [...]
[...] Cependant je n'ai jamais pu prendre sur moi de décharger mon coeur de cet aveu dans le sein d'un ami. La plus étroite intimité ne me l'a jamais fait faire à personne, pas même à madame de Warens. Tout ce que j'ai pu faire a été d'avouer que j'avais à me reprocher une action atroce, mais jamais je n'ai dit en quoi elle consistait. Ce poids est donc resté jusqu'à ce jour sans allégement sur ma conscience; et je puis dire que le désir de m'en délivrer en quelque sorte a beaucoup contribué à la résolution que j'ai prise d'écrire mes confessions. [...]
[...] Elle nie enfin avec assurance, mais sans emportement, m'apostrophe, m'exhorte à rentrer en moi-même, à ne pas déshonorer une fille innocente qui ne m'a jamais fait de mal; et moi, avec une impudence infernale, je confirme ma déclaration, et lui soutiens en face qu'elle m'a donné le ruban. La pauvre fille se mit à pleurer, et ne me dit que ces mots: Ah! Rousseau, je vous croyais un bon caractère. Vous me rendez bien malheureuse, mais je ne voudrais pas être à votre place. Voilà tout. Elle continua de se défendre avec autant de simplicité que de fermeté, mais sans se permettre jamais contre moi la moindre invective. Cette modération, comparée à mon ton décidé, lui fit tort. [...]
[...] Rousseau, ici, prétend que quelqu'un d'autre peut faire pire que ce qu'il a fait, alors qu'il a brisé la vie de Marion. Rousseau passe du statut de coupable à celui de victime Rousseau dit dans son analyse de fin : Je ne regarde pas même la misère et l'abandon comme le plus grand danger auquel je l'ai exposé Paradoxalement, Rousseau expose ses souffrances morales, suite à son acte, comme étant pire que la vie brisée de la jeune fille : mais au milieu d'une vie orageuse ; de voir dans mes insomnies cette pauvre fille venir me reprocher mon crime ; je n'ai jamais pu décharger mon cœur de cet aveu dans le sein d'un ami Alors, seule une exigence de pénitence aurai amené l'auteur à la confidence de cette faute, donc à la rédaction des Confessions. [...]
[...] Cette morale agit, par conséquent, sur la mise en scène de l'épisode qui semble inévitable. Texte : Il est bien difficile que la dissolution d'un ménage n'entraîne un peu de confusion dans la maison, et qu'il ne s'égare bien des choses: cependant, telle était la fidélité des domestiques et la vigilance de monsieur et madame Lorenzi, que rien ne se trouva de manque sur l'inventaire. La seule mademoiselle Pontal perdit un petit ruban couleur de rose et argent déjà vieux. [...]
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