"La femme ? Il ne voit guère son être individuel, il l'écoute encore moins. C'est la passion qu'il veut, malheur et bonheur, alternance brulante où il s'éveille. Qu'importe alors qu'elles se ressemblent toutes, ces dames des Amours..." Cette citation extraite d'une préface de Françoise Joukovsky, résume parfaitement l'idée véhiculée par les sonnets pour Hélène. Ronsard qui publie ces sonnets en 1578, ne se préoccupe que de la sublimation de son amour. La femme aimée n'est pas tant d'une importance fondamentale, mais c'est la matérialisation de ses sentiments, autant bons que mauvais, et l'idéal de l'amour qui caractérisent sa poésie dans ce recueil. Cette poésie se retrouve sous forme de sonnet, d'origine italienne, il intègre un huitain succédé d'un sizain, il fut d'ailleurs amené en France par Marot en 1536. Le sonnet que nous allons étudier est composé par des vers en Alexandrin, considéré comme un mètre "moderne" pour son époque. Ainsi même si Ronsard s'inspire de topos provenant de Pétrarque ou encore d'Ovide, des figures de l'Antiquité Gréco-latine, il ne se fermait pas à des formes plus novatrices. Ce qui le rendit populaire auprès de ses contemporains, comme Joachim du Bellay, mais qui le dénigra auprès des Classiques, comme François de Malherbe. Ceci nous mène au sonnet que nous allons étudier, le sonnet 63, il se situe vers la fin du second livre des sonnets pour Hélène.
Mais en quoi ce sonnet est un héritage du pétrarquisme ? Et de quelle manière Ronsard passe de l'amour sublimé à la douleur inexorable que celui-ci provoque ?
Dans un premier temps, nous étudierons les différentes marques liées à la poésie de Pétrarque. Pour dans un second temps, souligner la souffrance du poète qui est une source d'instabilité. Enfin dans un troisième temps, nous comprendrons l'évolution d'un amour par l'intermédiaire d'une métaphore.
Dans l'optique de souligner les marques du pétrarquisme dans ce poème, nous pouvons déjà considérer les deux premiers vers. Ils fonctionnent ensemble, et ils constituent une double identité de l'objet aimé. En effet, le destinataire, désigné dès le premier mot par le pronom personnel "vous" est l'objet d'un éloge de Ronsard (...)
[...] De cette manière, nous pouvons déceler une symétrie entre le second quatrain et le premier, autant le premier permet de révéler la vision du poète sur Hélène, tandis que dans le second quatrain, par l'intermédiaire du questionnement et de la prise à témoin d'Hélène, c'est elle qui se retrouve à poser un regard sur lui. Le sujet devient ainsi objet, et l'objet devient sujet. Ronsard s'interdit de porter davantage son regard sur elle, donnant lieu à ce renversement de point de vue. Ainsi nous assistons à un jeu de miroir intéressant, mais qui révèle également une sorte d'instabilité car nous ne sommes pas sur une base claire mais changeante. [...]
[...] Là encore, les rimes féminines encadrent les rimes masculines, comme pour signifier qu'Hélène entoure l'être de Ronsard et que son amour pour elle l'entrave. De cette manière, après avoir traité la question, de l'amour idéalisé glissant vers un amour douloureux, venons-en à la transformation de la métaphore du bouquet. En observant ce sonnet nous observons la volta inhérente au sonnet de Pétrarque, la volta équivaut à un changement de sujet, de thème majeur entre le huitain et le sizain. Dans ce sonnet, il est marqué par la conjonction de coordination mais au vers 9. [...]
[...] Dans cette optique, le destin n'y pourra rien et son amour non plus, contre le refus dû au libre arbitre d'une personne . Mais est-ce vraiment un problème pour Ronsard ? Il semblerait que non. [...]
[...] L'amitié n'est-elle pas la base de l'amour quelque part ? Sans amitié, il n'y a plus de confiance, si cette amitié est effacée alors l'amour ne peut exister par la suite. De manière décroissante, le poète à peur de perdre son amour puis son amitié, et c'est d'ailleurs dans cet ordre d'apparition que les termes se succèdent dans les vers 10 et 11. Notons que malgré cette opposition forte entre l'amour et la peur, deux termes forment une continuité dans le sonnet, hormis la métaphore du bouquet. [...]
[...] Nous pouvons y voir une fusion d'Hélène et de Ronsard, comme deux fleurs, qui se retrouvent en un seul et unique bouquet. Puisque cette métaphore les traverse l'un et l'autre au nom de l'amour, ne pouvons-nous pas y voir une relation charnelle fantasmé par le poète ? Le bouquet peut être également considéré d'une autre manière, le bouquet est comme sa définition l'indique un assemblage de fleurs, ne pouvons-nous pas y faire une relation entre le recueil des sonnets pour Hélène et ce bouquet ? [...]
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