Qualifié de libertin, le roman de Laclos met en scène des intrigues galantes ou les personnages parlent d'amour. Le sentiment occupe une place majeure et joue un rôle moteur dans l'intrigue. Toutefois, les personnages n'éprouvent pas tous le même sentiment. Le mot recouvre des réalités et des acceptions différentes qui se heurtent les unes aux autres. Honni par tous les protagonistes dans sa forme passionnelle, source de tous les désastres, mais aussi de tous les bonheurs, il apparaît cependant comme une force irrésistible et supérieure.
Il est question d'amour. C'est le sujet principal. Soit que les personnages mènent des entreprises de séduction, les libertins notamment, soit qu'ils éprouvent des sentiments tendres à l'égard les uns des autres, comme Cécile et Danceny.
[...] Les intrigues galantes sont menées au nom de l'amour ou de ce qui porte son nom. Un sentiment partagé par tous Tous les personnages principaux aiment. Tous sont animés par l'amour malgré ce qui devrait les en empêcher : les bienséances, les codes auxquels ils adhèrent, les principes qu'ils affichent. Danceny est chevalier de Malte, son statut de moine devrait respecter la jeune Cécile qui ne lui est pas destinée. Elle-même éprouve un sentiment qu'elle sait défendu (cf. lettres à Sophie ou répond aux reproches sous-entendus de son ancienne camarade). [...]
[...] Les deux personnages sont en proie à un véritable amour romanesque celui dont se moquent les libertins, mais qu'ils éprouvent paradoxalement. Le paradoxe du libertin Le distinguo subtil entre plaisir et amour effectué par la marquise est à mettre au service d'une entreprise de dénigrement de l'amour. Le mot et le sentiment qu'il désigne sont honteux, à tel point qu'un des enjeux de la conquête de Mme de Tourvel est initialement de sauver Valmont du ridicule d'en être amoureux (lettre 4). [...]
[...] Les assauts de Valmont contre Mme de Tourvel sont au cœur de l'intrigue, en forment même un fil directeur, la reconquête de Mme de Merteuil passe par là. Frears place cette double entreprise au centre du film, les scènes entre les deux libertins sont aussi abondantes que celles entre Valmont et Mme de Tourvel, elles se succèdent même. C'est que la guerre entre les deux libertins mène tacitement la danse, jusqu'à la crise finale, une guerre au sens au propre, dont le dénouement est fatal. Les deux personnages, complices au départ, finissent par diverger, notamment en ce qui concerne l'amour. [...]
[...] Son amour pour Valmont se substitue à sa foi. Lui-même est saisi par cette conquête qui l'occupe plus que de coutume. Il pose aussi d'emblée un regard différent sur elle (lettre séquence 3). Alternement dans ses lettres la moquerie à l'égard de la céleste dévote et la fascination amoureuse pour cette femme céleste Le dispositif épistolaire ne permet pas toutefois de trancher définitivement et Laclos de laisse planer le doute (lettre 154). Toutefois, les derniers mots de Valmont dans son ultime lettre ne sont-ils pas : on n'est heureux que par l'amour et transfiguré, que Stephen Frears met en scène lors du duel, en le faisant lui aussi, par le jeu des flash-back, mourir d'amour: Valmont se jette sur l'épée de Danceny parce que le souvenir du bonheur vécu avec Mme de Tourvel est trop vif et douloureux (séquence 29/ 30, plans 844- 852). [...]
[...] Il n'est souvent qu'un corps dont on use-ainsi le corps d'Emilie qui sert de table, ou encore celui de Cécile que Valmont n'hésite pas à prendre de force, qu'il forme comme celui d'une «fille dont c'est le métier»(let.115\séq.17\21). Mme de Merteuil voit alors dans Cécile une simple machine à plaisir (let.305) comme elle ne voit dans son propre amant, Belleroche, à plaisir »manœuvre d'amour (let.113). Cette réduction de l'autre témoignage d‘une volonté de toute-puissance ou l'amour (le vrai n'a guère de place . L'amour, le vrai ? [...]
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