Suite à son arrivée remarquée dans Rome, où il a provoqué et s'est attiré les coups de la foule, Robert parvient avec une énergie surprenante à entrer dans le palais de l'empereur, pour y trouver refuge. Robert suit les consignes de l'ermite à la lettre, il se fait passer pour fou, reste muet et dans cet épisode met en avant le dernier ordre qui est de manger dans la bouche d'un chien. Dans notre extrait, on peut voir que Robert en mangeant la viande destinée au chien s'attire la satisfaction de la cour qui le prend pour un véritable fou. On peut identifier trois mouvements dans cet extrait. Un premier mouvement allant du vers 1346 à 1364, nous présente un nouveau décor dans lequel l'empereur est en train de manger, puis du vers 1365 à 1434 on a le spectacle du fou faisant rire toute l'assemblée et enfin du vers 1435 à 1456, Robert se montre solidaire vis à vis du chien en lui donnant à manger et s'adonne à un repos bien mérité. On pourra donc se demander en quoi cet extrait de Robert le Diable est représentatif de la notion de folie au Moyen Age. Pour répondre à cette question, nous nous appuierons bien évidemment sur notre extrait mais également sur d'autres passages de l'œuvre. De plus, nous mettrons ce texte en relation avec d'autres œuvres de la même époque. Dans un premier temps, nous établirons une caractérisation du fou puis nous mettrons en évidence sa délicate position sociale, et enfin nous constaterons que la folie de Robert est simulée dans un objectif pénitentiel.
[...] La théâtralité Ce contraste entre ce monde du paraître et la solitude de rustre, d'homme sauvage que vit Robert renforce la tonalité théâtrale de l'extrait. En effet, le comportement du fou est un comportement qui évoque le théâtre. Le fou joue provisoirement un rôle. Le théâtre et la scène sont les lieux privilégiés d'une expression de la folie. En littérature, la dimension théâtrale de la folie n'apparaît pas que dans les scènes de folie simulée. Le fou qui a réellement perdu la raison est souvent présenté comme un acteur involontaire. Mais ce cas de figure est moins fréquent. [...]
[...] On constate dans Robert le Diable l'inspiration de récits tels que Vie des Pères. Après une vie d'aventures où il s'est livré à toutes les violences Robert se repent. Le saint ermite auquel il s'est confié et qui sait qu'il est sincère commence par le rassurer. Oiiés, amis, boine nouvielle Dieux veult que vous soiés garis »vers 1092-1093. Pour cela, Robert doit accepter de faire pénitence comme l'ermite le lui recommande. En premier lieu, il doit se faire si fin dervé afin que personne ne puisse le reconnaître et qu'il provoque les moqueries et les mauvais traitements de la foule en faisant semblant d'attaquer. [...]
[...] Robert fait une entrée fracassante dans la ville de Rome, avec son bâton au vers 1183. Ensuite, le fou doit fréquemment se défendre car on lui porte des coups. b ) Comportement Le fou a une alimentation qui lui est spécifique. En effet, il réalise une régression au stade animal, il se comporte comme les bêtes sauvages qui chassent pour se nourrir. Il ignore le langage, se nourrit de chair crue et laisse libre cours à son agressivité. Lors d'une folie pénitentielle, le saint imite la bête. [...]
[...] Quand Robert enlève la nourriture de la gueule du chien pour s'en nourrir lui-même. Toutes les personnes qui assistent à la scène éclatent de rire, les vers 1408-1409 confirment cela : L'emperere el chil de la sale en font grant fieste et sien rient Pour rire à la cour on n'a donc pas besoin et recours toujours aux talents des jongleurs. On rit de bon cœur des comportements et des saillies burlesques d'un fou de cour. On pourra également noter que ce motif du fou de table ne se renouvèle pas dans Robert le Diable. [...]
[...] Robert est adopté par l'empereur comme un fou de cour pour lequel une joyeuse affection est toujours éprouvée. Les bouffons au service des princes ou au service des autres nobles ne sont nullement maltraités. Si on analyse le cas des fous attachés à la personne royale ou impériale, on constate qu'ils sont protégés et généreusement rétribués à la mesure du processus de politisation dont bénéficie la folie au XIIème et XIIIèmesiècle. Dans Robert le Diable, l'empereur donne des ordres pour qu'on aménage un chenil confortable au fou qui joue au chien. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture