Aux yeux de Rimbaud, il s'agit bien encore de Délires, ou de l'histoire d'une de ses folies : c'est folie, en effet, d'avoir mis sa confiance dans la poétique qu'il pratiquait auparavant. Il tourne la page et se sert même des poèmes de cette époque (à l'exception de Voyelles qui est antérieur) pour illustrer son échec : la structure du texte est une poésie en paliers. Plus que cela, l'Alchimie du verbe devient une sorte de testament : celui qui "salue la beauté", qui en appel à la sensorialité du langage. L'alchimie du verbe a trouvé son issue.
"A moi", à ton tour, Rimbaud, de reprendre la parole. C'est "l'histoire d'une de ses folies. Depuis longtemps...". Le poète parle d'un passé révolu. En effet, il narre son "histoire" à l'imparfait : "je me ventais... trouvais... croyais... inventai... réservais... j'écrivais... notais... fixais...". L'imparfait, c'est le temps de la durée dans le passé, de l'habitude. C'est aussi la distinction du passé dans le passé. Mais Rimbaud ponctue également son texte de passé simple : "je régalai... flattai... habituai... expliquai...". On note une progression dans le temps : le passé devient d'habitude à révolu. De plus, le passé enferme le texte dans une durée qui, peu à peu, s'efface. Rimbaud use d'une redéfinition de la poésie, qui passe nécessairement par la destruction du passé et la restructuration du langage, des outils de langage.
La transmutation de Rimbaud s'ouvre dès sa première évocation de poème : "j'inventai la couleur des voyelles !..." (...)
[...] La transmutation de Rimbaud s'ouvre dès sa première évocation de poème : j'inventai la couleur des voyelles ! . A ce sujet, on notera l'inversion de Rimbaud : dans Voyelles, l'énumération procédait selon un ordre différent et se terminait par O. Autrement dit, fin de toute chose et plongée dans l'inconnu, le désordre. Ici, les voyelles retournent à leur habituelle succession, c'est-à-dire à la banalité. Peut-être Rimbaud a-il perçu dans son inversion première une sorte d'inutilité, une action vaine car trop peu importante du langage usuel. [...]
[...] La terreur venait puis sa nécessité de voyager, distraire les enchantements assemblés sur mon cerveau je voyais se lever la croix consolatrice : Rimbaud souhaitais se soulager les yeux, suspendre sa vision. Enfin, ad matutinum, au Christus venit : au petit matin, le Christ est venu. Finalement, cela s'est passé. Je sais aujourd'hui saluer la beauté cette origine innocente. Mais Rimbaud ne semble pas complètement abandonner son but : cela s'est passé ce n'est pas cela m'est passé En effet, il semble associé quelque chose de fatal, d'impersonnel à sa progression. [...]
[...] A terme, on retrouve bien une alchimie du verbe, une parfaite transmutation engendrée par chaque palier du poème, chaque étape. La transformation s'accomplie. La métamorphose de Rimbaud, c'est son expansion dans l'ici-bas. Son alchimie du verbe est un véritable appel à la sensorialité du langage : il produit ses sensations et ses effets. Lui, Rimbaud, il succombe à cela. Il est perdu dans ce monde, toujours déchiré entre deux univers. Le langage y trouve sa force, son essence. Le langage poétique est unique et vrai. [...]
[...] Plus que cela, l'Alchimie du verbe devient une sorte de testament : celui qui salue la beauté qui en appel à la sensorialité du langage. L'alchimie du verbe a trouvé son issue. A moi à ton tour, Rimbaud, de reprendre la parole. C'est l'histoire d'une de ses folies. Depuis longtemps Le poète parle d'un passé révolu. En effet, il narre son histoire à l'imparfait : je me ventais trouvais croyais inventai réservais j'écrivais notais fixais L'imparfait, c'est le temps de la durée dans le passé, de l'habitude. C'est aussi la distinction du passé dans le passé. [...]
[...] La terreur venait. Je tombais dans des sommeils de plusieurs jours, et, levé, je continuais les rêves les plus tristes. J'étais mûr pour le trépas, et par une route de dangers ma faiblesse me menait aux confins du monde et de la Cimmérie, patrie de l'ombre et des tourbillons. Je dus voyager, distraire les enchantements assemblés sur mon cerveau. Sur la mer, que j'aimais comme si elle eût dû me laver d'une souillure, je voyais se lever la croix consolatrice. [...]
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