Le texte est un extrait de Lokis (1869) qui fut rédigé par l'écrivain français Prosper Mérimée. C'est une nouvelle fantastique dont l'histoire est inspirée des légendes lituaniennes : elle relate le séjour d'un linguiste prussien, Kurt Wittembach, dans un château où il se confronte à un personnage des plus mystérieux, le comte Szémioth. Son effroi s'accroît au fil de l'histoire puisqu'il découvre graduellement la nature trouble de son hôte. À la fin du récit, le lecteur tend à croire que le comte ne serait autre que le fruit du viol d'une femme par un ours d'où certaines caractéristiques peu communes. L'aristocrate serait une créature étrange (mi-homme, mi-ours), mais cela sans que le narrateur ne le dise explicitement préférant laisser le lecteur interpréter.
Le texte à étudier se situe au milieu de la nouvelle (chapitre III). Dans cette partie, le philologue et le comte traversent la forêt et se dirigent vers le château de Dowghielly pour y rejoindre Mlle Loulka, qui sera un jour la future fiancée du comte. Sur leur chemin, ils croisent une vieille dame à l'allure étrange et c'est à partir de là que le dialogue à analyser commence.
[...] Elle espère l'empêcher de rejoindre la belle demoiselle comme si elle avait connaissance du dénouement de l'histoire. Elle aurait anticipé la tragédie qu'il allait avoir lieu (Loulka sera retrouvé morte le lendemain de la nuit de noces), ce qui pourrait expliquer sa volonté à ne pas vouloir indiquer le chemin. Enfin, le comte aurait, en apparence, une connaissance très accrue de la forêt et de ceux qui y vivent : il a renseigné le professeur sur une curieuse tradition dans laquelle il se trouverait un canton avec des bêtes qui vivent en communauté, ignorant l'empire de l'homme Cela constitue encore un élément déconcertant qui vient s'ajouter sur la liste des détails troublants. [...]
[...] L'écriture est simple, rapide et facile à comprendre. Son style est à part avec une rédaction qui se caractérise par sa sobriété. Le manque de développement est propre de la nouvelle mériméenne ce qui en fait une narration efficace, brève et concise. Le discours est homodiégétique ou autodiégétique puisque c'est un récit à la première personne dans lequel le narrateur s'identifie à un personnage de l'histoire : le philologue prussien dans cet ouvrage. La nouvelle se place ainsi en focalisation interne, avec un point de vue qui consiste à représenter les événements à travers la sensibilité et le regard d'un personnage. [...]
[...] La sorcière semblerait voir au-delà des simples apparences, elle aurait le don de voir qui est réellement le comte intérieurement, d'où cette proposition des plus fougueuses. Ces particularités rendent le comte potentiellement menaçant, car il aurait l'envergure d'un roi de la jungle. Ce serait une allusion à l'animalité dissimulée du comte. Également, le diable désigne le roi de l'enfer : les allusions à Satan rejoignent ainsi le discours de la vieille dame sur l'idée de trouver un nouveau roi. Gêné, semble-t-il, par cet entretien, le comte s'empresse vite de changer de sujet en faisant passer cette comparaison sur le compte de la raillerie épigramme et en demandant son chemin à la sorcière. [...]
[...] C'est une allégorie qui ferait référence à Mlle Loulka, la belle jeune fille du château de Dowghielly. En outre, la colombe est un animal symbolique qui désigne l'amour ou la fidélité. Elle fut l'objet de nombreuses légendes antiques et bibliques. Par ailleurs, les multiples insinuations de la vieille dame à propos de la belle semblent intimider le comte. Il est tout émoustillé après avoir discuté d'elle. Cette anecdote montre qu'il est capable de ressentir une affection amoureuse, ce qui le rend capable d'aimer et donc de manifester une certaine humanité. [...]
[...] Ces occurrences sataniques auraient pour effet de conjurer le sort, à savoir que le diable est, par excellence, le personnage le plus fantasmagorique qui soit. Par la suite, lorsque le comte demande au professeur s'il veut se faire tirer les cartes, celui-ci réplique qu'il se garderai bien d'encourager de semblables pratiques. Ainsi, pour apaiser ses craintes, le savant prussien s'accroche à ses convictions rationnelles en se montrant réfractaire à toute forme de pratique occulte. De cette manière, il aurait l'impression de se protéger contre toute menace d'origine surnaturelle, surtout si elle concerne la nature ambiguë de son hôte. [...]
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