Recueil des vers, Et la Mer et l'Amour, Pierre de Marbeuf, analyse linéaire, amour, mer, poésie
L'auteur commence par émettre un rapprochement entre ces deux entités apparemment fort distinctes que sont « la mer » et « l'amour », groupes nominaux composés notamment d'un article défini ; celui-ci nous indique que le poète s'essaye à une définition mutuelle et dynamique : avec subtilité et adresse, les thèmes de la mer et de l'amour seront liés et même filés tout au long du poème.
[...] qui nous conduirait encore plus loin, sur les mers de l'interprétation, par amour pour l'âme du texte . L'on peut percevoir la répétition d'un même son l'on peut interpréter que d'entendre ce son comme caché, qui se prête aux ouïes fines de lecteur qui décèlent à travers ce discret retentissement une connivence secrète entre l'amour et la mer : l'on s'éprend d'âme si l'amour est véritablement vécu, et non frivolité passagère, et l'on peut espérer en matière d'amour que c'est bien l'âme qui commande les élans du coeur, à la faveur d'un je-ne- sais quoi d'indéfinissable mais au gré de quoi l'on se laisse conduire, mené, malmené ; de cela, l'âme est maître d'oeuvre, en cela `le coeur a ses raisons que la raison ne connaît pas' dirait Pascal, ce à quoi l'on ajouterait qu'un principe directeur est vraisemblablement suggéré ici par Marbeuf ; et, de même, l'âme - pour peu que l'on prête des intentions à l'inanimé - est figurée par la mer, fluctuante, agitée, sensible, changeante, d'une profondeur inconnue, comme l'atteste l'expression de `vague à l'âme', désignant un mal-être, un mal de vivre ou une difficulté d'être sans cause bien définie. [...]
[...] Si la mer est amère, alors l'amour doit s'avérer amer. Le parallélisme de construction syntaxique produit l'effet d'une égalité entre amour et amer : la distribution de « amer » est commune, égale, cette qualité faisant facteur des deux par l'attribut du sujet. L'on repère la similaire et exactement égale - en nombre de syllabes - composition (ternaire) des deux groupes nominaux, double sujet du groupe verbal C.O.D `ont l'amer'. Mais il faut garder à l'esprit qu'amour et mer, quoiqu'ici rapprochés, sont essentiellement bien distincts : l'amour est un sentiment, une notion tout à fait métaphysique et abstraite, tandis que la mer désigne un élément physique, une concrète étendue d'eau salée. [...]
[...] Pour dire vrai, Pierre de Marbeuf recueille ici ces vers, afin de donner au lecteur à présent d'amour averti comme une formule à chaque vers, unis par l'impératif de donner un aperçu sensible et réfléchi des affres de l'amour fluctuant, aussi agité que les flots peuvent l'être, pour faire sourdre ici les dangers d'un naufrage tu, en mer comme en amour, figurant leurs maux par ces mots. [...]
[...] `Et tous deux ils seront sans hasard de naufrage.' En mer comme en amour, le fin mot . coeurs sensibles s'abstenir . En réalité, telle qu'envisagée à travers ces vers, le poète prévient que la mer comme l'amour fluctuent et comprennent une grande part de risque, jusqu'à impliquer, par leur nature, un péril, déjà renversant tel qu'il en présente l'idée, tout d'envergure a priori : de cela que la retenue est de mise pour qui craint les eaux et pour celui qui craint les maux de l'amour (proximité phonétique encore une fois proche de l'homophonie parfaite entre ces deux objets de crainte que sont ces C.O.D respectifs de l'expression anaphoristique `celui qui craint'). [...]
[...] Cet alexandrin s'en trouve parfaitement scindé, constitué de deux propositions de six syllabes, et l'idée de « l'amer pour partage » renforcée. Si Marbeuf souligne donc bien l'amertume des deux entités « et la mer est amère, et l'amour est amer », c'est de placer également une virgule entre les deux groupes de mots, créant ainsi une césure à l'hémistiche qui sépare les deux termes tout en gardant une certaine égalité : ces deux entités sont affirmées comme les deux termes principaux du poème. [...]
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