Marguerite Duras, roman, ravissement de Lol, complexité, Jacques Hold, Jacques, Lol, Tatiana, déconnecté, réel, impuissance, passé, réécriture, ambiance, théâtre, passage, narrateur, lecteur, auteur, angle
Le passage se situe au moment où Jacques Hold et Lol se retrouvent seuls devant chez elle, après que Jacques ait pris la décision de rester, plutôt que de partir en même temps que les autres invités. Lol a donc pu lui révéler dans la confidence son intérêt pour lui, et cette attirance est réciproque, bien que le narrateur montre dans un premier temps de la retenue. Jacques Hold devient alors l'objet du fantasme de Lol pour le triangle amoureux, et elle lui avoue dans cet extrait avoir observé sa rencontre avec Tatiana dans l'Hôtel du Bois, ce qui a en réalité provoqué son intérêt pour lui.
[...] En prononçant le nom de Jacques, comme si elle lui jetait un sort, Lol s'empare de son identité et se glisse déjà en partie dans sa vie. Celui-ci en est d'ailleurs plus ou moins conscient, du moins il ressent les conséquences de ce moment presque instantanément. La parole de Lol est comme un élément contaminant qui efface les identités tout comme la sienne « pour la première fois, explique Jacques Hold, mon nom prononcé ne nomme pas » page113). Le « je » du narrateur disparaît pendant un instant après ce moment, et il sent son identité devenir floue « au moment où mes mains se posent sur Lol le souvenir d'un mort inconnu me revient : Michael Richardson, l'homme de T. [...]
[...] On apprend de quoi il s'agit à la page qui suit notre extrait « elle attend que je n'aie plus peur de Tatiana ». On comprend que Lol attend d'avoir suffisamment détruit le lien du couple pour que Jacques s'autorise à l'aimer elle, pour qu'il lui donne l'accès à cet amour, et cela lui permet en quelque sorte de fusionner son seulement avec Tatiana mais aussi avec Jacques à travers le regard partagé du corps de Tatiana nue. Pour se faire, elle doit lui annoncer qu'elle a vu le couple dans un de leurs moments les plus intimes, dans leur chambre d'Hôtel. [...]
[...] La tournure de phrase « Elle a un corps » utilisée au lieu de « son corps » rappelle la rupture que Lol a subi avec son corps lors de son traumatisme. Elle ne peut plus fusionner totalement avec son enveloppe physique qui lui échappe et qui ne lui appartient pas complètement. L'apparence filiforme de Lol lui donne une allure presque mystique, l'allure d'un esprit flottant.Cette impression est renforcée par d'autres termes du texte comme « l'effacement constant » qui la définit ou encore l'apparence pâle de ses traits. [...]
[...] Elle décrit la manière dont elle a rencontré Jacques comme si elle connaissait tout de lui, comme si elle avait un point de vue omniscient sur la situation, ce qui montre encore une fois son besoin de contrôler ce moment et son obsession. Elle a toujours vu Jacques comme un personnage fictif qu'elle pouvait utiliser. À la fin du paragraphe dans lequel elle explique chaque fait et geste de Jacques avec une grande précision, il répond « Que c'est faux ». [...]
[...] La parole de Lol est si peu consistante qu'il faut parfois attendre plusieurs pages du roman pour comprendre la signification complète d'une simple phrase qu'elle a prononcée, mais qui tarde à s'expliquer. C'est aussi ce qui fait d'elle une femme mystérieuse et intrigante. Dans ce passage, nous avons l'explication de la phrase « je vous ai choisi ». En réalité le lecteur a déjà les éléments qu'il lui faut pour deviner la réponse mais pas le narrateur. Pour lui c'est une révélation totale. [...]
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