Phèdre, héroïne de la pièce de Racine qui porte son porte son nom, aime d'amour son beau-fils Hippolyte. Décidée à mourir plutôt que d'avouer la passion incestueuse qui la torture, elle se trouve, à la scène 3 de l'acte I, en présence de sa nourrice Oenone, qui s'efforce au contraire de rappeler sa protégée à la vie. Or rien ne se passe comme on pourrait l'attendre : Phèdre donne des indications sur ce qu'elle prétend cacher, tandis qu'Oenone multiplie les maladresses en employant des expressions riches d'une ironie qui lui échappe. Tel est le contenu implicite de ce dialogue qu'il faut examiner maintenant de plus près en envisageant successivement les paroles prononcées par Phèdre, puis celles de sa nourrice.
Justification du plan
Le plan par personnages nous a paru ici s'imposer, parce que le sel de cet échange provient d'une double ambiguïté Phèdre révèle ce qu'elle prétend cacher, Oenone se méprend et tient involontairement des propos à double sens.
I. Le double jeu de Phèdre
Il est indéniable que le comportement de Phèdre est à placer sous le signe de l'ambiguïté ; ce qui le prouve d'abord, c'est le fait qu'elle ait dévoilé à sa nourrice son intention de se tuer ; n'est-ce pas là une manière inconsciente d'appeler au secours ?
A. Stratégie de l'aveu
On n'est pas moins frappé par la façon dont Phèdre a recours, spontanément, à la stratégie classique de l'aveu qui consiste à exagérer la faute, pour qu'une fois découverte elle apporte un soulagement au destinataire. C'est ainsi que Phèdre, qui n'a commis, somme toute ; qu'un péché d'intention, se donne le visage d'une criminelle comme l'atteste le lexique marqué par une certaine outrance : "la coupable durée", "aveu funeste", "criminelle".
La même stratégie conduit logiquement la jeune femme à fournir à Oenone des indications propres à lui déléguer la tâche de prononcer les mots tabous (...)
[...] et l'insistance présente dans le vers 206, Malheureuse, quel nom est sorti de ta bouche ? sont-ils de nature à guider l'inquisitrice : il semble qu'une ruse spontanée soit ici mise en œuvre ; par ce vers 206 particulièrement, Phèdre indique la source de son mal et lorsque Œnone, abusée par un contresens bien naturel, part dans la mauvaise direction, Phèdre la remet sur la voie : J'en ai trop prolongé la coupable durée C. Les mots-clés sous l'accent Très subtilement, l'information est ici glissée à l'aide d'un simple adjectif sur lequel portent cependant les deux accents de l'hémistiche. [...]
[...] où le mot cœur est en position forte à l'hémistiche révèle en particulier la source du désespoir de Phèdre ; et, quand, par les vers 225 et 226 nous apprenons qu'il existe un reste à dire et un aveu funeste à prononcer, le doute, pour le lecteur ou le public du moins, n'est plus permis. Conclusion partielle et transition Ainsi se trouve remarquablement mise en évidence par Racine cette innocente tricherie peut-être plus fréquente chez les enfants (mais Phèdre est ici en présence de sa nourrice), qui nous conduit à manifester de la détresse par un silence et des réticences éloquentes que l'interlocuteur en réalité, pour devoir de violer. [...]
[...] À ce fier ennemi de vous, de votre sang, Ce fils qu'une Amazone a porté dans ses flancs Cet Hippolyte . Phèdre : Ah, Dieux ! Œnone : CE REPROCHE VOUS TOUCHE. Phèdre : Malheureuse, quel nom est sorti de ta bouche ? Œnone : Hé bien 'votre colère éclate avec raison : J'aime à vous voir frémir à ce funeste nom. Vivez donc. Que l'amour, le devoir vous excite. Vivez, ne souffrez pas que le fils d'une Scythe Accablant vos enfants d'un empire odieux, Commande au plus beau sang de la Grèce et des Dieux. [...]
[...] Mais ne différez point : chaque moment voie tue. Réparez promptement votre force abattue, Tandis que de vos jours, prêts à se consumer, Le flambeau dure encore, et peut se rallumer. Phèdre : J'en ai trop prolongé la coupable durée. Œnone : Quoi ? de quelque remords êtes-vous déchirée ? Quel crime a pu produire un trouble si pressant ? Vos mains n'ont point trempé dans le sang innocent ? Phèdre : Grâces au ciel mes mains ne sont point criminelles. [...]
[...] Œnone : Et quel affreux projet avez-vous enfanté Dont votre cœur encore doive être épouvanté ? Phèdre : JE T'EN AI DIT ASSEZ. ÉPARGNE MOI LE RESTE. JE MEURS POUR NE POINT FAIRE UN AVEU SI FUNESTE Introduction : présentation du texte et annonce du plan 5 I. Le double jeu de Phèdre 6 A. Stratégie de l'aveu 6 B. Ruse spontanée 7 C. Les mots-clés sous l'accent 8 Conclusion partielle et transition 8 II. La maladresse d'Œnone 10 A. [...]
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