Dans le cadre de l'étude d'une oeuvre intégrale, Phèdre de Racine, ce document propose une troisième lecture méthodique : le récit de Théramène (Acte V, scène 6, du vers 1498 au vers 1570).
[...] - la composition : Racine choisit une progression linéaire, qui suit l'ordre chronologique des événements de manière à ce que le récit soit facile à suivre. Ainsi peut-on distinguer 7 étapes : Départ de Trézène ; Un fracas effroyable déchire les airs ; Le monstre surgit des flots ; Hippolyte seul affronte le monstre et le blesse, mais ses chevaux effrayés s'emballent ; Le char d'Hippolyte se brise ; Horrible vision des rochers et des ronces qui ont déchiqueté son corps ; dernières paroles d'Hippolyte confiées à Théramène. [...]
[...] »(V.1542-1544) Le pittoresque des descriptions : Bien que narration et description soient intimement liés dans ce récit, deux descriptions au moins méritent notre attention, par l'usage que fait Racine de figures de style : - d'abord l'irruption du monstre (vers 1513 à 1524) : L'apparition proprement dite de cet animal mythique est précédée d'une sorte de cataclysme marin. Pour suggérer l'ampleur extraordinaire du phénomène, Racine use de métaphores : Cependant sur le dos de la plaine liquide / S'élève à gros bouillons une montagne humide ; 1514) La surface de l'eau est comparée à une plaine terrestre d'où surgirait une montagne, phénomène bien plus impressionnant qu'un simple ras de marée. [...]
[...] Si l'on se place dans cette perspective, l'éloge funèbre d'Hippolyte constitue implicitement une véritable accusation portée contre ce père qui a commis une si tragique erreur de jugement en ce qui concerne son propre fils. Théramène, en exaltant les vertus héroïques d'Hippolyte, blâme l'aveuglement de Thésée. Mais Théramène souhaite plus encore que le ressentiment laisse place dans l'âme de Thésée à la compassion : dans ce but, il n'épargne à son interlocuteur aucun détail sur le caractère horrible de la mort de son fils : il évoque les rochers couverts de sang, les ronces dégouttantes qui Portent de ses cheveux les dépouilles sanglantes. [...]
[...] Des contemporains de Racine ont d'ailleurs critiqué la longueur et la prétendue monotonie de ce récit. Caractéristiques du texte à étudier : Il faut noter d'abord que le récit de Théramène s'insère habilement à la fin du cinquième acte, pour marquer l'issue fatale de cette machine infernale qu'est une tragédie : les fausse accusations de Phèdre ont eu pour conséquence la colère de Thésée contre son fils, et son recours aux puissances divines, pour venger son honneur qu'il croit à tort gravement offensé par son fils. [...]
[...] Dans le dernier hommage qu'il lui rend, Théramène affirme qu'il s'est conduit comme le digne fils d'un héros (V.1527) Son courage égale donc celui de son père : Théramène le désigne, à la manière des héros de l'épopée homérique, L'intrépide Hippolyte (v.1542), c'est-à-dire celui qui, seul, a osé affronter sans trembler, le plus effrayant des monstres. Le Minotaure qu'a tué Thésée avait été engendré humainement. Le dragon qu'affronte Hippolyte est une création infernale sortie des entrailles de la terre. D'ailleurs, la légende s'est déjà emparée de l'événement : On dit qu'on a vu même / Un dieu intervenir pour exciter ses coursiers ; mais Hippolyte ne s'en est pas moins dépensé en efforts impuissants pour tenter jusqu'au bout de les rappeler (V.1549). [...]
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