Commentaire détaillé de l'extrait de Du côté de chez Swann de M. Proust décrivant le jardin aux nymphéas : texte, notes explicatives, situation du texte, développement en trois parties et sous-parties, éléments pour la conclusion.
[...] Beaupré : mât placé à l'avant plus ou moins obliquement. [...]
[...] Il faut d'ailleurs noter que les plantes aquatiques ne constituent pas toujours le thème de la phrase, mais disparaissent souvent derrière les réalités auxquelles elles sont comparées : ainsi, hormis les nymphéas et les espèces plus communes sont nommées des roses la julienne (plante formant des grappes de fleurs) et des pensées des jardins en tant que comparants, et non en tant que plantes relevant de décor décrit. La seule fleur aquatique nommée est en fait le nymphéa, une variété de nénuphar. Mais encore l'est-elle après l'image qu'elle suggère : Çà et là, à la surface, rougissait comme une fraise une fleur de nymphéa au cœur écarlate, blanc sur les bords L'image passe avant la désignation de l'objet décrit. [...]
[...] Le nom même de nymphéas suggère la grâce du lieu, par la mélodie de ses voyelles et parce qu'il est proche des nymphes. Proust aime les mots rares et précieux pour évoquer des réalités rares. De plus, le travail sur la syntaxe, de plus en plus compliquée au fur et à mesure du texte (l'allongement de la phrase qui, depuis Ailleurs emplit toute la seconde moitié du texte, est à l'image de l'écoulement continu et lent de l'eau), vise à en ralentir la lecture, à renvoyer à la quasi immobilité de la Vivonne ici, à suggérer une certaine plénitude, dans un processus analogue à celui de la méditation dont les jardins aquatiques d'ExtrêmeOrient sont le point de départ : il s'agit de ralentir le flux des pensées, de se laisser envahir par la perception du jardin, de ses éléments, et enfin, au-delà, par la sérénité qui en émane, et qui s'élève du plus profond de soi. [...]
[...] Le fait que, le soir, les couleurs de l'eau fassent penser à quelque port lointain avec le rose et ( . ) la rêverie du couchant semble également une référence au symbolisme baudelairien, renforcée par l'emploi de l'adjectif mystérieux L'association d'une note descriptive avec une expression morale est également typique de cette intériorisation des sensations, fondement des correspondances que Baudelaire décelait entre le monde extérieur et la vie intérieure. Pourtant, si le texte évoque d'autres textes, comme le tableau que l'on a sous les yeux renvoie à d'autres tableaux, ce n'est pas pour respecter l'esthétique et l'éthique d'artistes précédents (ainsi que Proust le faisait encore dans Voiles au port dans Les Plaisirs et les Jours en 1894), mais c'est pour suggérer, dans une vision artistique de la nature, que l'œuvre que nous avons là avec ce jardin aquatique s'inscrit dans la lignée d'autres œuvres, dans un effet de miroir obligatoire dans l'art. [...]
[...] Transition : mais plus encore qu'une description picturale, ce texte donne l'impression d'être la description d'un tableau lui-même, ou plus exactement de la nature comme une œuvre d'art. Proust va en effet ici plus loin que dans Voiles au port en présentant la nature comme une véritable œuvre d'art, qui s'inscrit dans la lignée d'autres œuvres d'art, et le texte n'est plus une œuvre d'art qui rend compte de la nature, mais une œuvre d'art qui renvoie à une autre œuvre d'art, selon un principe de miroir réciproque. [...]
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