Jusqu'à la fin du 18ème, l'originalité n'est pas très prisée chez les poètes et écrivains. De fait le talent d'un artiste se voit à la façon par laquelle il réussit à plier son inspiration aux règles établies. Le romantisme bouscule ces règles traditionnelles. Les sujets de représentation sont également renouvelés : au moins autant que le Moyen-Âge, l'orient est alors une source d'inspiration importante. Avec
[...] La voix plus haute Semble un grelot. D'un nain qui saute C'est le galop. Il fuit, s'élance, Puis en cadence Sur un pied danse Au bout d'un flot. La rumeur approche, L'écho la redit. C'est comme la cloche D'un couvent maudit, Comme un bruit de foule Qui tonne et qui roule Et tantôt s'écroule Et tantôt grandit. Dieu! La voix sépulcrale Des Djinns! . - Quel bruit ils font! Fuyons sous la spirale De l'escalier profond! [...]
[...] La liberté du rythme épouse parfaitement ce mouvement : dans la huitième strophe, les trois derniers vers sont irréguliers comparés à la césure des premiers vers puis tel ce tourbillon qui semble emporté la maison et la raison de l'homme. La peur semble en effet submerger cet homme dans la cinquième strophe. Un discours affolé fait son apparition, avec profusion de points d'exclamation. L 'apostrophe Dieu ! et l'assonance en on sur plusieurs vers, contribuent à créer et entretenir ce climat terrifiant. L'évocation de l'ombre qui rampe enrichie ce climat : le poète éveille alors ces peurs nocturnes instinctives qui peuvent transformer dans l'imaginaire une ombre en une angoisse, un monstre terrifiant. [...]
[...] Ce champ lexical s'étoffe avec maudit vers 28, sépulcrale vers 33, livide vers 47, l'enfer vers 55. Ainsi le climat qui s'installe (dans tous les sens du terme) est propice à l'évocation de ces êtres inquiétants ; leurs manifestations, leurs facultés sont à la fois déroutantes et contradictoires : ils sont à la fois légers et lourds comme un essaim comme un troupeau (dans la dixième strophe) et semblent un nuage livide puis un noir bataillon (dans la huitième strophe). [...]
[...] Ainsi, des Arabes Quand sonne le cor, Un chant sur la grève Par instants s'élève, Et l'enfant qui rêve Fait des rêves d'or. Les Djinns funèbres, Fils du trépas, Dans les ténèbres Pressent leur pas; Leur essaim gronde; Ainsi, profonde, Murmure une onde Qu'on ne voit pas. Ce bruit vague Qui s'endort, C'est la vague Sur le bord; C'est la plainte Presque éteinte D'une sainte Pour un mort. On doute La nuit . J'écoute: Tout fuit, Tout passe; L'espace Efface Le bruit. V.Hugo, Les Orientales, XXVIII, 1829. [...]
[...] Cette Ombre de la rampe/ Qui le long du mur rampe,/ Monte jusqu'au plafond (dans la cinquième strophe) rappelle en effet l'ombre de rêverie (poème X des orientales) qui s' »amasse au fond du corridor lorsque le poète rêve d'orient à sa fenêtre ; le couvent (quatrième strophe), la vieille porte rouillée (septième strophe), le souffle froid de l'aiguillon »(huitième strophe) , les chênes (dixième strophe relèvent également d'un paysage occidental. De même que vampires et dragons n'existent pas chez les orientaux. Le je s'orientalise, en particulier lorsqu'il apostrophe le prophète dans la neuvième strophe. Les djinns sont là, l'affolement atteint son paroxysme. De l'apostrophe Dieu ! [...]
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