Dans le cadre de l'étude d'une oeuvre intégrale, Phèdre de Racine, ce document propose une lecture méthodique de l'aveu de Phèdre à Hippolyte, Acte II, scène 5, du vers 670 au vers 711.
[...] - Le passage au tutoiement, qui trahit l'oubli des convenances et impose une relation d'intimité sans se préoccuper de savoir si l'interlocuteur y consent. Ce tutoiement durera jusqu'à la fin de l'aveu. - L'emploi de l'impératif, mode de l'ordre donné : Eh bien ! connais donc Phèdre et toute sa fureur. Il y a quelque chose d'agressif dans cette manière d'imposer une vérité qui ne peut que choquer et troubler profondément Hippolyte, un manque de respect comme si Phèdre commettait une sorte de viol moral. [...]
[...] Cette fureur amoureuse qui s'est emparée d'elle l'a littéralement métamorphosée en un monstre, un monstre moral évidemment : cf. ; la reprise du mot au vers 701 un monstre qui t'irrite puis au vers 703 ce monstre affreux (Racine affirme bien dans sa préface qu'il a peint le vice avec des couleurs qui en font connaître et haïr la difformité autrement dit la monstruosité.) C'est cette monstruosité que Phèdre semble observer avec stupeur quand elle se décrit à la 3ème personne : Eh bien ! Connais donc Phèdre et toute sa fureur . [...]
[...] quand il n'est pas relayé par l'emploi du mot amour (v.675, v.699) Un aveu dont la fureur provoque la terreur : Phèdre a longtemps tenu cette passion inavouable secrète. Il a fallu toute l'insistance d'Oenone pour obtenir le premier aveu. Une fois la brèche ouverte, on a le sentiment que tout ce qu'elle a refoulé refait surface violemment surtout au moment où Hippolyte cherche à se soustraire à sa vue. Et cette passion libérée atteint une telle puissance qu'elle transforme Phèdre en furie : D'où cette déclaration directe, insistante, provocante, soulignée par le tutoiement, qui surprend par le caractère impudique des paroles prononcées : en laissant voir le caractère si profondément sensuel de cet amour, de telles paroles transgressent toutes les règles de la bienséance, du respect de soi et des autres. [...]
[...] Un plaidoyer pathétique : séduire Hippolyte en l'apitoyant ? Trans. : Paradoxalement, au moment même où elle avoue de manière si provocante son amour à Hippolyte, Phèdre tente de le convaincre qu'elle est la victime pitoyable de forces qui la dépassent. Pour cela elle développe un plaidoyer où l'on voit se succéder plusieurs arguments : Une conscience morale accablée sous le poids de sa culpabilité : - le premier argument réfute par avance ce qu'Hippolyte pourrait penser d'un aveu aussi indécent, à savoir que l'épouse de son père est une femme peu respectable. [...]
[...] Mourir de la main d'Hippolyte : un supplice si doux Il est certain que Phèdre est déchirée entre son désir fou de séduire Hippolyte et son intense culpabilité. Et c'est la raison pour laquelle son discours est constamment ambigu : Si tes yeux un moment pouvaient me regarder. Phèdre insiste d'abord sur le caractère destructeur de sa passion : son amour est une maladie mortelle J'ai langui, j'ai séché, dans les feux, dans les larmes dit-elle. Le verbe languir indique un état morbide de mélancolie qui se traduit par la perte de toute énergie. [...]
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