Pereira prétend, Antonio Tabucchi, roman, auteur, littérature, ambiguïté narrative, narrateur, portrait, anti-héro, influence positive, personnage, mise en scène
Le roman d'Antonio Tabucchi, sorti en 1994 et lauréat du prix Campiello, est présenté comme un récit avec une ambiguïté narrative. Comme le suggère le sous-titre "un témoignage", l'oeuvre de l'auteur italien se base sur un narrateur indéfini qui, à la lecture, apparaît être le héros éponyme, le professeur Pereira. Dans la lecture, une phrase, « Pereira prétend » crée cette incertitude narrative, mais c'est pourtant autour de cette phrase qui ouvre, ferme et se répète souvent que le récit se fonde et se tisse. Avec ses vingt-cinq chapitres écrits dans une prose plate et très sobre, la lecture est accessible à tous. En moins de 150 pages, l'auteur nous présente la vraie métamorphose d'un intellectuel plongé dans le Portugal des années 1930.
[...] Pour la première fois, il écrit et signe de son propre nom un article dans lequel il dénonce la violence et le meurtre de Rossi. Avec la complicité du docteur Cardoso, qui se fait passer pour le major Lourenço, responsable de la censure au téléphone, Pereira parvient à faire parvenir l'article aux imprimeurs et à en assurer la publication. Pereira rentre chez lui et choisit un passeport français parmi les faux documents que lui a laissés Monteiro Rossi . Il fait une valise avec le strict nécessaire, y compris le dossier avec les nécrologies jamais publiées. [...]
[...] La rencontre avec le jeune résistant Rossi est suffisamment forte pour démontrer comment la littérature va métamorphoser le protagoniste principal en intellectuel engagé. Cette histoire résume assez bien la phrase qui est au cœur de l'œuvre étudiée : " La philosophie donne l'impression de s'occuper seulement de la vérité, mais peut-être ne dit-elle que des fantaisies, et la littérature donne l'impression de s'occuper seulement de fantaisies mais peut-être dit-elle la vérité. phrase faisant écho au propos de l'auteur quelques mois après la sortie du livre : "La littérature doit dépasser le bout de la rue, montrer ce qu'une caméra ne voit pas, illuminer les coins obscurs de la vie, de la réalité, insinuer des doutes dans la tête des gens". [...]
[...] Pereira passe d'abord quelques jours aux thermes de Buçaco . Là, il rencontre son directeur et rencontre un vieil ami, Silva , professeur de littérature à l'Université de Coimbra, avec qui il discute de la situation politique européenne . Ses inquiétudes, alimentées par les entretiens avec les deux jeunes révolutionnaires, se heurtent à l'inertie de l'interlocuteur; déçu, Pereira part plus rapidement que prévu . Dans le train de retour, il se retrouve aux côtés Ingeborg Delgado , une Allemande d'origine portugaise, juive, qui s'est rendue à Coimbra pour «retrouver ses racines», en attendant de recevoir un visa de l'ambassade américaine pour quitter l'Europe et fuir vers les États-Unis. [...]
[...] Véritable anti-héro noyé dans ses pensées morbides, Pereira semble, dans les premières pages du roman, trop recentré sur ses propres problèmes pour s'intéresser à la politique. La littérature et les traductions sont alors un échappatoire salutaire dans la fuite de ce quotidien qui se résume aux cadres de son épouse décédée ainsi qu'aux problèmes que lui posent son corps trop gras. Cette littérature, qui l'endort, est la même qui va le conduire à rencontrer des personnes pour sortir de son quotidien routinier. [...]
[...] Au contact de différents protagonistes que la passion littéraire le pousse à rencontrer, Pereira sort de sa léthargie initiale et suit son chemin de formation en tant que personnage dynamique. Grâce à des rencontres importantes, comme celle avec Mme Del Gado et avec le Dr Cardoso, qui lui explique la théorie de la confédération des âmes, Pereira comprend que la politique menace des valeurs fondamentales telles que la liberté. Il traduit alors des histoires et découvre qu'elles sont aussi politiques, comme "Vive la France" de Maupassant. [...]
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