Lecture analytique sur le dénouement du roman de Balzac Le père Goriot.
[...] Il s'agit donc de déterminer comment, dans son achèvement même, le livre trouve les raisons de se poursuivre. Tout comme l'incipit consistait en un faux départ, l'explicit se donne comme un faux dénouement. Pour le montrer, il faut tout d'abord déterminer comment cette scène d'enterrement est le couronnement sordide du roman, puis voir en quoi elle est aussi l'achèvement d'une tragédie et, enfin, ce qui fait d'elle le moment d'une naissance paradoxale. I. Un enterrement sordide A. Le décor religieux et l'itinéraire de la mort. [...]
[...] Si le héros s'est élevé, il n'en demeure pas moins qu'il est sans argent, comme en témoigne l'emprunt qu'il doit faire à Christophe pour le pourboire des fossoyeurs. C. Le défi à Paris : Rastignac ou Balzac ? Après l'enterrement de Goriot, Rastignac, qui meurt au monde l'enfance, ensevelit sa part de pureté et d'innocence, prix à payer pour conquérir la ville présente sous ses yeux et qu'il contemple dans une position de surplomb à la manière des héros romantique. Paris s'étend en contrebas comme un serpent tortueusement couché avec son cortège de tentations. [...]
[...] Les enterrements ne seraient-ils qu'une mise en scène où chaque personnage s'efforce de tenir le rôle qui lui incombe, parfois avec hypocrisie ? Déjà La Fontaine, dans sa fable Le Curé et le Mort, ironisait : Un mort s'en allait tristement S'emparer de son dernier gîte ; Un Curé s'en allait gaiement Enterrer ce mort au plus vite. Verlaine écrira par la suite un sonnet intitulé L'Enterrement où il fustige les héritiers resplendissants. Dans le dénouement de son roman, Le Père Goriot, Balzac reprend cette vision réaliste et satirique de la société et de ses conventions. [...]
[...] L'absence de personnages. Au dénuement de l'enterrement fait écho l'absence de personnages : les filles Goriot ne sont présentes qu'à travers la médiation du médaillon posé sur la poitrine du père défunt ; leurs maris n'ont pas daigné assister à la cérémonie mortuaire. Le symbole des calèches armoriées et vides représentant le luxe, la position sociale des filles à travers les armoiries, mais aussi le vide de leur cœur, l'absence de toute humanité. Il ne reste que Rastignac et Christophe, qui trouve ici la justification de son prénom porte-christ selon l'étymologie grecque). [...]
[...] L'achèvement d'une tragédie A. Un paysage symbolique. L'atmosphère sombre et la proximité de la chapelle, dans ce quartier miséreux, sordide où le père Goriot a terminé sa triste destinée. La scène se passe en fin d'après-midi, à une heure crépusculaire : cinq heures et demie ; humide crépuscule ce qui contribue à créer un sentiment de finitude. Climat humide, sombre d'une fin de journée tristesse, énervement B. La mise au tombeau d'un Christ. L'ignominie de l'abandon de Goriot par ses filles et sa mort solitaire font de cet incurable de la passion paternelle un martyr. [...]
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