Pascal, "Pensées", fragment 164 : étude linéaire

Résumé du document

La liasse VII est consacrée aux « contrariétés » de l'homme : grandeur passée et misère actuelle. Afin d'inciter le lecteur à écouter Dieu, Pascal brosse un tableau pathétique de la condition de l'homme, paradoxe vivant à cause de sa bizarrerie, de sa dualité (grandeur et misère) et de sa double nature. Les lignes 1 à 22 montrent le tableau ambigu de l'homme et le rejet conjoint des pyrrhoniens et des dogmatistes. 2) Les lignes 23-28 démontrent sur le ton d'un sermon, un appel emphatique et solennel à écouter Dieu 3) Les lignes 29 à 42 insistent sur le rappel de la double nature de l'homme, obstacle à la connaissance eu bonheur. Comment grâce à une éloquence très imagée et exaltée Pascal cherche-t-il à persuader le lecteur de s'en remettre à Dieu ?

I) Lignes 1 à 22 : le tableau ambigu de l'homme (alliance paradoxale et monstrueuse de qualités et de défauts) et le rejet conjoint des pyrrhoniens et des dogmatistes.
Les lignes 1 à 5 démontrent, dans cette longue phrase exclamative au rythme haletant, nominale pour l'essentiel, que l'homme est réduit à un ensemble étrange, hétéroclite, disparate, à un assemblage difforme. L'orateur fait s'entrechoquer des termes qui s'opposent, et le procédé de l'asyndète est un paradoxe vivant, simultanément doté de grandeur et de misère, et une énigme insoluble, tellement ses contradictions sont fortes. Certaines images sont destinées à marquer les esprits, voire à susciter l'effroi ou le dégoût chez le lecteur, afin de le déstabiliser : « imbécile ver de terre...cloaque d'incertitude et d'erreur, gloire et rebut de l'univers ! » (...)

Extraits

[...] Par conséquent, s'il a conscience de sa misère, c'est le signe irréfutable de sa déchéance. La longue période finale, lignes 35-42, très scandée, est fondée sur des antithèses, un jeu subtil d'échos et de variations entre les termes : c'est encore un tableau de la misère et des limites de l'homme. Ce mouvement s'achève d'ailleurs sur l'adjectif déchus renforcé par l'adverbe malheureusement Pascal le janséniste dramatise ici de nouveau la condition de l'homme, monstre incompréhensible à la fois incapable de découvrir la vérité et déchu de s nature antérieure. [...]

[...] Pascal, Pensées, fragment 164, p. 116-117 : du début à malheureusement déchus La liasse VII est consacrée aux contrariétés de l'homme : grandeur passée et misère actuelle. Afin d'inciter le lecteur à écouter Dieu, Pascal brosse un tableau pathétique de la condition de l'homme, paradoxe vivant à cause de sa bizarrerie, de sa dualité (grandeur et misère) et de sa double nature. Les lignes 1 à 22 montrent le tableau ambigu de l'homme et le rejet conjoint des pyrrhoniens et des dogmatistes. [...]

[...] L'éloquence pascalienne met en jeu le cœur, l'émotion autant que la raison, la logique argumentative. Le ton, très sentencieux, est à la fois celui d'un moraliste avec une exploitation habile des parallélismes syntaxiques et des échos phoniques : humiliez vous raison impuissante ! Taisez-vous, nature imbécile et celui d'un chrétien fervent. La seule solution à l'énigme de l'homme vient d'un ordre supérieur à celui de la nature et de la raison : Dieu. L'appel final à la foi, très solennel ; est mise en relief par les blancs typographiques qui l'entourent et par sa brièveté: Ecoutez Dieu IV) Lignes 29 à 42 : le rappel de la double nature de l'homme, obstacle à la connaissance et au bonheur. [...]

[...] cloaque d'incertitude et d'erreur, gloire et rebut de l'univers ! II) Lignes 6 à 22 : l'interrogative initiale est rhétorique et plutôt désespérée. Le XVIIe siècle est celui de l'ordre et de la clarté et Pascal est un écrivain classique. Or, il constate que l'homme échappe à la raison et ne peut être défini, comme l'indique de façon percutante la formule : l'homme passe l'homme Pascal réfute ensuite conjointement les deux orientations philosophiques, le pyrrhonisme et le dogmatisme, pour affirmer avec force que la vraie nature de l'homme est seulement connue de Dieu. [...]