Guy Goffette est un poète belge contemporain, né en 1947. En 1995, il publie un recueil de poèmes, intitulé "Le Pêcheur d'eau". Goffette consacre une part de son ouvrage à des poèmes inspirés par l'admiration qu'il a pour d'autres poètes qui l'ont précédé. La « Prière pour aller au Paradis avec Jammes» est une de ces « dilectures ». Pour rendre hommage au poète Henri Jammes, auteur chrétien du début du XXe siècle, Goffette réécrit sa « Prière pour aller au Paradis avec les ânes». En un long poème, composé de 34 distiques et de deux vers isolés, il chante son respect et son admiration pour son illustre prédécesseur.
[...] De plus, le titre choisi par Goffette est une réécriture explicite du titre de Jammes. Enfin et surtout, le poète belge cite en filigrane des vers de Jammes. Au vers 66, il fait ainsi explicitement référence au paradis des ânes» que peignait avant lui le mystique français et file la métaphore animale avec le verbe braire Jammes se dessine par conséquent comme un vieux» sage (v. qui maîtrise l'art poétique. Par effet d'antithèse, Goffette n'est qu'un gosse qui balbutie, sinon brai[t] (v. [...]
[...] Enfin, le poète français est sans cesse associé au champ lexical de la verticalité: paradis grimpette tout droit sont autant de syntagmes qui soulignent que Jammes a atteint les Champs-Élysées des poètes. Il est maintenant un bienheureux, admiré et envié du commun des poètes. [B. La réécriture comme gage, d'admiration] L'hommage que Goffette rend à Jammes ne se lit pas que dans les mots lyriques. En choisissant de réécrire la Prière pour aller au Paradis avec les mes le poète belge exhibe son admiration pour les vers de son illustre aîné. [...]
[...] Ainsi, de façon attendue, Jammes s'adressait, à Dieu dans sa Prière pour .aller au Paradis avec les ânes et interpellait le Seigneur par un vouvoiement respectueux Mon Dieu, faites qu'avec ces ânes je Vous vienne v. 26). Il serait inexact d'affirmer que Dieu est absent des vingt derniers vers de Goffette : ce dernier conserve en effet une apostrophe à Dieu Ô Seigneur v. 164) mais la rend secondaire. En effet, le Créateur n'est interpellé qu'une seule fois et en fin de poème. [...]
[...] 68) donne à la 'parole un tour familier ; de plus, Dieu paresse sous son propre soleil. En effet, du Créateur, seules sont soulignées l'oisiveté et la passivité: «qui dormez entre la camomille / et le sainfoin» (v. 65-66). Loin d'être perfection, Dieu est rabaissé au statut de simple humain et suscite sinon le rire, du moins le sourire du lecteur . [Conclusion partielle et transition] La prière de Goffette n'a plus rien de sacré: le poète subvertit les codes rhétoriques de la prière, la parodie et la désacralise, pour mieux y couronner un être profane: Henri Jammes qu'il élève au rang de dieu poétique, Les vers de Goffette peuvent ainsi être lus comme un hommage profane à la littérature, et plus encore à Jammes. [...]
[...] Devant son Apollon qu'est Jammes, il s'agenouille en médiocre suppliant et use images tressautantes (v. invitées à fleurir . [Conclusion] La Prière pour aller au Paradis avec Jammes» de Guy Goffette oscille entre irrévérence et soumission: irrévérencieux, son poème l'est car il désacralise la forme de la louange à Dieu; irrévérencieux encore car il désacralise la figure du poète, réduit à n'être qu'un humble saltimbanque. Cependant, la parole poétique sait aussi sacraliser: elle loue et magnifie un poète: Jammes. En sa dilecture Goffette rend donc hommage à son prédécesseur. [...]
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