Commentaire composé sur le poème Sonnet, tiré de Mes heures perdues de Félix Arvers.
[...] Son mal est sans issue, comme l'atteste la chute du sonnet (vers 14) : bien qu'elle lise ses textes, la femme qu'il aime ne peut pas comprendre que celui-ci lui est destiné. Le devoir de silence condamne par avance toute tentative d'épanchement sentimental : v.3 sans espoir et dû le taire v.4 n'en a jamais rien su v.5 inaperçu v.8, v.10 sans entendre donnent au sonnet des accents élégiaques, mais cette plainte est à l'image de l'amour conçu par le poète, pudique et timide. [...]
[...] L'emploi contrasté des temps (le constat au présent et au passé dans les quatrains laisse la place au futur dans les tercets) traduit le désarroi du poète et confirme le caractère impossible de son désir : il sait son amour, depuis ses prémisses, voué à l'échec. Conclusion : Ce sonnet presque classique reprend les grands thèmes de la poésie lyrique : l'amour, la mort, le temps qui passe. Toutefois son charme et sa renommée tiennent essentiellement au rythme particulier du premier vers. [...]
[...] La disposition choisie, opposant les quatrains consacrés au mal du poète aux tercets décrivant l'attitude de la femme aimée révèle la déchirure intime du poète : il est amoureux mais n'ose pas se déclarer. Le système énonciatif permet d'identifier d'une part le poète qui s'implique dans son texte je v et d'autre part celle qu'il aime et qui n'est ni nommée ni décrite précisément celle v.4, elle v 13). Elle est le sujet des phrases et est placée en début de vers : v et 13 (le pronom personnel ouvre et ferme le vers). Alors que le poète parle de lui dans les quatrains, la femme aimée est évoquée surtout dans les tercets. [...]
[...] Ce poème reprend le thème classique de la passion amoureuse destructrice et livre la confession désespérée de sa victime. Poème : Mon âme a son secret, ma vie a son mystère: Un amour éternel en un moment conçu. Le mal est sans espoir, aussi j'ai dû le taire, Et celle qui l'a fait n'en a jamais rien su. Hélas! j'aurai passé près d'elle inaperçu, Toujours à ses côtés, et pourtant solitaire, Et j'aurai jusqu'au bout fait mon temps sur la terre, N'osant rien demander et n'ayant rien reçu. [...]
[...] Cette contradiction intime s'exprime aussi dans la disposition inhabituelle des rimes dans les quatrains : la première strophe est en effet constituée de rimes croisées (ABAB), la deuxième de rimes embrassées mais disposées dans l'ordre inverse (BAAB). Cette disposition anarchique traduit certainement le mal-être du poète, tout comme les assonances en présentes dans onze vers sur quatorze. Cette passion platonique est cependant racontée sur un mode lyrique et pathétique. Le poète veut partager sa souffrance avec le lecteur, dont il fait son confident privilégié. [...]
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