Les Paravents, Jean Genet, valeurs sociales, littérature, pièce de théâtre, théâtre
De 1954 à 1962, la guerre d'Algérie oppose à la France les nationalistes algériens qui réclament l'indépendance. C'est un combat sanglant qui donne lieu à des répressions, des guerres civiles et des tortures. En 1961, en pleine guerre d'Algérie, Jean Genet publie Les Paravents, une pièce qui fait scandale, car elle fait directement référence à ce conflit. Genet est un auteur volontiers subversif, qui fait la guerre aux conventions sociales pour en débusquer toute l'hypocrisie, les faux-semblants. Incarcéré pour vol dans sa jeunesse, il aborde volontiers les sujets du mal, de la trahison, du crime, pour les magnifier, et ainsi détruire toutes les valeurs de la société. Il dénonce l'hypocrisie française et la politique coloniale.
[...] Pourtant, de nouveau, la situation tragique est désamorcée par le burlesque : Ommou, qui vient de tuer Saïd, se plaint d'avoir une vie bien fatigante et réclame une aspirine. Mais le fait que presque tout le monde soit consterné montre bien qu'il s'agit d'un instant tragique, celui de la mort du héros de la pièce. De plus, un des combattants dit à Ommou qu'elle mourra bientôt. Une didascalie nous indique qu'après la sortie des combattants et de Ommou, les comédiens emportent les paravents et les objets dans les coulisses. Le fait que les accessoires soient rangés indique bien que l'on assiste à la fin de la pièce. [...]
[...] Le fait que sa beauté épaule sa cruauté et que chacune se nourrisse de l'autre montre bien comment, sous couvert de bonté, on peut mal agir en secret. Genet pointe à nouveau l'hypocrisie des soldats. La Mère appelle Saïd, qu'elle ne voit toujours pas arriver dans le royaume des morts, ce qui l'inquiète. Toutefois, Kadidja lui réplique qu'il ne viendra pas, tout comme Leïla. Ainsi, Saïd et Leïla passent directement à la nullité de la mort, alors que les autres doivent passer de l'autre côté du paravent pour se purifier et abandonner toutes les illusions de la vie. [...]
[...] L'antithèse qui oppose « saloperies » et « lumineux » est d'une intense ironie, et pointe peut-être la gloire factice que tirent les soldats de leurs actes terribles. L'effet est d'un burlesque très noir. Le vocabulaire est à nouveau très familier : « saloperies », « l'arrachage des ongles des arpions » (mention particulièrement dégoûtante). L'Académicien enfonce le clou en disant que le sergent, lui qui est manifestement coupable d'actions si infâmes, possède sa plaque, c'est-à-dire qu'il est reconnu pour son courage pendant la guerre. [...]
[...] Nous nous demanderons donc comment, dans cet extrait tragique et trivial à la fois, Jean Genet représente le rejet de toutes les valeurs sociales à travers son personnage Saïd. Nous analyserons le texte en quatre parties : des pages 272 au début de la page 273, Ommou propose à Saïd de s'enfuir pour rester indemne, puis des pages 273 à 274, la Mère intervient par des insultes pour dissuader Saïd de faire le traître, ensuite au milieu de la page 274, Saïd est abattu, et enfin dans le reste du texte, on assiste aux retombées de la mort de Saïd et à la fin de l'oeuvre. [...]
[...] En effet, pour elle, Saïd représente la révolte, l'espoir qu'ils ont d'être libres. Dans une figure de gradation, il devient leur « trésor », puis leur vie tout entière : « C'est par lui qu'on respire » : la formule emphatique permet de mettre en valeur le pronom « lui », qui représente leur souffle vital. Sans Saïd, ils seraient tous morts, car ils perdraient tout espoir et se laisseraient tuer. Cette mort qui plane sur eux tous se traduit physiquement chez Ommou, qui se met à tousser, « cassée en deux », comme si elle était déjà mourante. [...]
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