Antres moussus à demi-front ouverts,
Prés, boutons, fleurs et herbes roussoyantes,
Vallons bossus et plages blondoyantes,
Et vous rochers, les hôtes de mes vers,
Puis qu'au partir, rongé de soin et d'ire,
A ce bel oeil Adieu je n'ai su dire,
Qui près et loin me détient en émoi,
Je vous supplie, Ciel, air, vents, monts et plaines,
Taillis, forêts, rivages et fontaines,
Antres, prés, fleurs, dites-le-lui pour moi.
[...] L'apostrophe à la Nature : La composition du sonnet fait apparaître trois temps : d'abord les quatrains sont consacrés à l'évocation de la nature ; la régularité du décasyllabe dépeint la sérénité et le calme. Ensuite le poète adresse une supplique à la nature dans le deuxième tercet, avec des effets d'écho et de refrain. En effet, le même rythme scande les vers : quatre puis six mesures. La description de la nature est détaillée (11 vers sur 14) et hyperbolique. [...]
[...] Elle devient la dépositaire des secrets du poète, sa confidente et son double, ainsi que la preuve de son génie : comme Orphée, le premier poète, Ronsard est capable par son talent poétique, de parler à la Nature et de l'émouvoir. Conclusion : L'évocation de Cassandre semble n'être qu'un prétexte littéraire pour chanter le pouvoir de la poésie. Le poète, interlocuteur privilégié de la nature et magicien des mots, est donc supérieur à l'homme qui n'a pas su dire adieu à la femme aimée. [...]
[...] L'ordre naturel se trouve donc mis en valeur, ainsi que son harmonie. Ronsard décrit une nature accueillante par son ouverture Ciel plains découverts v.1, ouverts v.5), la vivacité de ses couleurs vineux v.2, verdoyantes v.2, verts v.4, blondoyantes v.7), sa vitalité verdoyantes v.2, ondoyantes v.3, moussus v.5, roussoyantes v.6). On relève la répétition des mêmes éléments dans les vers 1 et 12 ; et 13 ; et 14 : le caractère redondant de la description est renforcé par la redondance circulaire des apostrophes, qui encadrent le sonnet. [...]
[...] Le présent du vers 11 peut donc se lire comme un présent de vérité générale : le mal d'aimer consume le poète à petit feu. Le registre élégiaque se nourrit du caractère pathétique de sa situation puisqu'il ne peut manifestement pas réparer son erreur par lui-même, soit que la femme est déjà trop loin, soit qu'elle ne veut plus le voir. Son dernier espoir se reporte enfin sur l'intervention providentielle d'une nature En partenariat avec www.bacfrancais.com complice et bienveillante sur laquelle il décharge tous ses regrets : dites-le lui pour moi v.14 reprend l'Adieu, je n'ai su dire v.10. [...]
[...] La proposition principale est rejetée dans le dernier hémistiche, à l'ultime vers, pour offrir la chute du poème, qui constitue aussi son principal argument. Toutefois, la surprise du dernier vers a été préparée tout au long du texte par la personnification subtile de la nature en femme, grâce à un jeu sensuel d'oppositions mimant le jeu de la séduction : les formes rondes monts v.1, vallons v.7, bossus v.7) offertes à la vue découverts v.1, ouverts v.5) alternent avec les formes qui se cachent, comme pour se refuser au poète ondoyantes tors v.3). [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture