Commentaire composé sur l'incipit de L'Etranger d'Albert Camus. De « Aujourd'hui, maman est morte » jusqu'à « pour n'avoir plus à parler ».
[...] Or Cette écriture semble mettre à distance la mort de la mère du narrateur par une accumulation de maladresses d'expression : l.7 il qualifie celle-ci d' excuse Aux lignes 12-13, l'expression affaire classée appartient au vocabulaire administratif, pénal ou policier et manifeste son envie d'en finir rapidement, voire son embêtement. Le seul terme qui pourrait décrire le choc subi par l'annonce de la mort de sa mère, étourdi l.17, ne se rapporte pas à la tristesse du narrateur mais la subordonnée de cause l.17-18 signale que cet étourdissement est dû au fait qu'il a monté les escaliers. Pire ! Dans le trajet qui l'emmène à l'asile, il s'endort l.22. [...]
[...] Nous verrons d'abord en quoi cet incipit est déconcertant pour le lecteur, puis nous analyserons l'attitude assez surprenante du narrateur. Un incipit déconcertant : L'incipit dans un récit a souvent la même fonction qu'une scène d'exposition au théâtre : il s'agit d'informer le lecteur sur : Le lieu : en Algérie l.4 (le narrateur habite loin de l'hospice où il a placé sa mère). Les autres repères spatiaux donnent des indications sur son cadre de vie : au restaurant chez Céleste l.15, chez Emmanuel l.18. [...]
[...] Néanmoins, ce début est pour le moins étrange pour plusieurs raisons. D'abord cette mort est rapportée d'une manière directe (sujet + verbe + attribut) et indifférente par le narrateur : le style quasiment télégraphique évacue tout registre pathétique. Il semble étranger au monde dans lequel il vit (il s'auto justifie devant son patron, comme s'il était coupable du décès de sa mère l.7-8-9 ; il n'arrive pas à réaliser la mort de celle-ci l.1112 ; il est introverti et refuse le contact humain l.24-25). [...]
[...] Aucune précision n'est donnée sur Emmanuel, hormis le fait qu'il a subi lui aussi un deuil. Ce qui semble intéresser le narrateur n'est pas les circonstances de ce décès mais la possibilité qui lui est offerte d'emprunter les accessoires du deuil l.18 une cravate noire et 19 un En partenariat avec www.bacfrancais.com brassard Bien que le champ lexical de la mort soit très développé dans les 3 premiers morte l.1, décédée et enterrement l.2, veiller l.6, condoléances l.10, deuil l.11, etc.), le narrateur n'exprime aucun sentiment personnel, ce qui peut surprendre voire choquer le lecteur. [...]
[...] La cause de cet assoupissement n'est pas non plus le chagrin mais la fatigue physique l.20-22. Conclusion : Ce début de récit est surprenant essentiellement car celui qui conduit la narration semble en marge des normes sociales. Au procès, c'est cette marginalité qui lui sera reprochée et non l'acte criminel pour lequel on le jugera : pour être un homme, il faut pleurer à l'enterrement de sa mère. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture