« Le surréalisme, tel que je l'envisage, déclare assez notre non-conformisme absolu » affirme Breton à la fin de son Manifeste de 1924. En d'autres termes, le mouvement surréaliste permet à l'esprit de s'affranchir des usages établis. Dans Nadja, Breton se révolte contre plusieurs institutions. Nous verrons lesquelles mais surtout pourquoi l'auteur s'insurge contre ces dernières.
Afin de mettre le lecteur dans le bain dès le début, Breton se lance dans une diatribe de la littérature à affabulation romanesque dans les premières pages de Nadja. Fervent partisan du surréalisme, il commence par une remise en question de ce genre de romans qu'il oppose à ses propres valeurs surréalistes.
Breton rejette la fiction du « roman à clé » qu'il trouve d'une réalité sans intérêt et trop linéaire. Le défaut du réalisme selon lui est de flatter l'opinion des goûts les plus bas tout en se calquant sur la vie réelle la plus plate : « elle (la littérature réaliste) est faite de médiocrité, de haine et de plate suffisance », Manifeste du surréalisme.
Il n'accepte pas que le roman puisse prétendre donner l'autonomie du protagoniste d'être vivant. Il dénonce la fabrication de toutes pièces du personnage qui semble être autonome tandis qu'en réalité ses actions sont organisées de façon arbitraire par un auteur qui sait exactement où il veut en venir. « [Les réalistes] prétendent mettre en scène des personnages distincts d'eux-mêmes et les campent physiquement, moralement, à leur manière », P.17.
En outre, Nadja s'oppose à deux concepts que Breton critique : il n'y a pas d'artifice de la psychologie chez les personnages dans l'oeuvre de Breton. Nadja ne relève d'aucun type d'humain formé. D'autre part, Nadja est contre la conception de l'intrigue.
Contrairement au réalisme, le surréalisme prône une libération de l'imagination et une vie ouverte au hasard qui ne soit pas tracée. Cette doctrine convient à la perfection au personnage de Nadja (rencontres inattendues, étrangeté de son comportement à certaines reprises). (...)
[...] D'autre part, Nadja est contre la conception de l'intrigue. Contrairement au réalisme, le surréalisme prône une libération de l'imagination et une vie ouverte au hasard qui ne soit pas tracée. Cette doctrine convient à la perfection au personnage de Nadja (rencontres inattendues, étrangeté de son comportement à certaines reprises). Breton apprécie tout particulièrement ce qu'il appelle les faits glissades et faits précipices qui sont des surprises qui nous révèlent à nous-même et totalement dépourvues de rationnel. D'autre part, il préfère les livres qu'on laisse battants comme des portes à l'écriture ouverte qui laissent une place importante au surréel et à l'imaginaire. [...]
[...] En second lieu Breton critique le travail qui est une des positions centrales des surréalistes. Ces derniers reconnaissent qu'il est nécessaire dans la société et qu'il est difficile de s'en passer. Ils l'acceptent comme une nécessité matérielle car il faut bien pouvoir accès à la société de consommation. Cependant ils n'admettent aucune valeur morale en lui. Breton refuse catégoriquement de croire au travail ou de le vénérer. Il préfère encore être dans un espace-temps irréel : Je préfère, encore une fois, marcher dans la nuit à me croire celui qui marche dans le jour. [...]
[...] Il est intéressant de noter que Breton a étudié le domaine de la psychiatrie et connaissait les risques que pouvait avoir son comportement à l'égard de Nadja. On pourrait avancer qu'il est indirectement le coupable de son internement. Cette critique de l'asile psychiatrique peut être vue comme un moyen défensif de la part de Breton afin de rejeter la faute sur quelqu'un d'autre. La vie asilaire a enseveli le génie libre Nous pouvons clore cette analyse en affirmant que Nadja se révèle être une contestation des pouvoirs et des institutions en place lors du début du 20ème siècle. [...]
[...] Aujourd'hui encore on [ne sort] guerre plus aisément des asiles qu'autrefois des couvents P.164. Breton raille les différents arguments qui y sont avancés et en vient à condamner la question de l'internement. Breton conclue que les asiles sont contre-productifs. Ils ne guérissent pas ceux qui y sont internés mais bien au contraire ils les affaiblissent. Les problèmes occasionnels des patients deviennent persistants avec le temps. L'enfermement ne permet donc aucune rémission, on y crée des fous au lieu de les soigner. [...]
[...] Breton pense même que le travail est un obstacle à la quête de son existence : L'événement dont chacun est en droit d'attendre la révélation du sens de sa propre vie, cet événement que peut-être je n'ai pas encore trouvé mais sur la voie duquel je me cherche, n'est pas au prix du travail. »P.69. Breton doit définitivement se libérer du travail avant de pouvoir être prêt à rencontrer Nadja. Sa disponibilité doit être totale. Finalement, Breton s'insurge contre l'institution asilaire et l'internement. Il est nécessaire de savoir que les partisans du mouvement surréaliste ne reconnaissent pas la psychanalyse comme pratique thérapeutique. Ils comparent la psychiatrie à un enfant, n'étant qu'un stade initial et non opérationnel. C'est pourquoi Breton s'y attaque férocement dans Nadja. [...]
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