Les Mots, « la bibliothèque, c'était le monde pris dans un miroir ? » - Jean-Paul Sartre (1905-1980) - Réflexion autour de cette formule

Thèmes abordés

Jean-Paul Sartre, Sartre, autobiographie, Les Mots, lire, bibliothèque, c'était le monde pris dans un miroir, représentation de la réalité, réel

Résumé du document

La question du rapport entre la réalité et l'art et notamment la littérature est une question cruciale qui a fait s'interroger de nombreux écrivains et philosophes depuis l'Antiquité et en particulier Platon qui développa le concept de Mimésis. L'art aurait cette fonction et cette capacité à représenter le réel. Sartre, en revenant sur son enfance au milieu des livres en vient lui-même à dire que « la bibliothèque, c'était le monde pris dans un miroir ? ». Que faut-il comprendre dans cette formule ? On peut comprendre que la littérature, le monde des mots est une reproduction du réel. La littérature présente-t-elle cette capacité à représenter le monde tel qu'il est ? Peut-on donc penser, comme Sartre, que « la bibliothèque » est « le monde pris dans un miroir », c'est-à-dire qu'il le reproduit parfaitement ? Ne pourrait-on pas présenter des limites à cette faculté trop grande que l'on prêterait au monde des mots, à la littérature, de présenter parfaitement le réel tel qu'il est ?

Extraits

[...] Les Mots, « la bibliothèque, c'était le monde pris dans un miroir ? » - Jean-Paul Sartre (1905-1980) - Réflexion autour de cette formule La question du rapport entre la réalité et l'art et notamment la littérature est une question cruciale qui a fait s'interroger de nombreux écrivains et philosophes depuis l'Antiquité et en particulier Platon qui développa le concept de Mimésis. L'art aurait cette fonction et cette capacité à représenter le réel. Sartre, en revenant sur son enfance au milieu des livres en vient lui-même à dire que « la bibliothèque, c'était le monde pris dans un miroir ? ». [...]

[...] I - La bibliothèque, le monde des mots reproduit le réel La thèse de Sartre, son enthousiasme enfantin pour le monde livresque. Dans cet extrait, Jean-Paul Sartre s'oppose de manière malicieuse aux écrivains qui décrivent souvent leur enfance au milieu de la nature : « je n'ai jamais gratté la terre ni quêté des nids ». Il explique que son enfance s'est déroulée au milieu des livres, en bon bourgeois parisien qu'il était : « les livres ont été mes oiseaux et mes nids ». Il explique ainsi « la bibliothèque, c'était le monde pris dans un miroir ». [...]

[...] Cette question du rapport entre le monde réel et le monde des mots est une question cruciale du monde intellectuel. Elle a intéressé énormément le philosophe Jean-Paul Sartre qui prônait une littérature engagée, c'est-à-dire qui se tournait vers le monde. S'il serait illusoire sans doute de penser que la littérature peut reproduire exactement le monde comme un calque, faut-il pour autant penser qu'elle est incapable de nous dire quelque chose du monde qui nous entoure et l'enfermer dans une impuissance à nous dire quelque chose de cette réalité autour de nous ? [...]

[...] II - La bibliothèque, le monde des mots et leurs limites à reproduire le monde tel qu'il est Un Sartre revenu de l'idéalisme vers lequel l'avait tournée une enfance trop livresque On peut penser cependant que la littérature détourne en vérité du monde tel qu'il est. Jean-Paul Sartre explique ainsi que cette enfance passée dans un univers par trop livresque l'a incité à s'intéresser davantage, et à donner davantage d'importance et de réalité aux mots eux-mêmes qu'aux choses. Il fait référence à ce propos à Platon, un philosophe pour lequel le monde sensible, le monde tel qu'il nous est donné n'est qu'une copie du monde intelligible. [...]

[...] Ainsi, Jean -Paul Sartre, en décrivant son enfance citadine au milieu des livres plutôt qu'au milieu des champs nous a fait part de la façon dont il a découvert le monde plutôt par l'intermédiaire de ces derniers que directement. Cela ne semble pas un inconvénient de prime abord puisque « la bibliothèque » serait comme « le monde pris dans un miroir ». Cette croyance en la capacité du monde des mots à représenter le réel à d'ailleurs vu naître un courant littéraire fortement prégnant au XIXème siècle, à savoir le réalisme. [...]