Alceste comprend parfaitement qu'il est manipulé et que Célimène se joue de ses sentiments en lui retournant ses accusations sans y répondre avec une certaine cruauté. C'est parce que Célimène sait qu'il l'aime trop pour la quitter qu'elle a pu se tirer de ce mauvais pas avec un mensonge si gros. Alceste retourne la violence contre lui-même ce qui donne des accents de héros tragique à Alceste et qui révèle la profondeur des sentiments qu'il éprouve malgré lui.
[...] Il crut qu'il pourrait se séparer de Célimène, il se rend alors compte de l'emprise qu'a Célimène sur lui. Avec "amour" (vers 1384/1422/1432) et encadre même sa dernière réplique avec le champ lexical de l'amour avec "cœur" qui revient trois fois, "tendresse"(vers 1388), "ardeur" (vers 1423). Ces substantifs se renforcent par "fatal amour" ou "extrême". Son appréciation exacte de la situation rend compte de la lucidité du personnage, ce qui en fait un personnage unique de Molière. Le personnage ne se sert pas de sa propre clairvoyance pour agir, avec autant d'habilité que Célimène. [...]
[...] Vous savez vous servir de ma faiblesse extrême", "l'excès prodigieux", "fat au amour", ce qui donne des accents de héros tragique à Alceste et qui révèle la profondeur des sentiments qu'il éprouve malgré lui. Pire encore, partagé entre sa passion et sa clairvoyance, il va jusqu'à supprimer un mensonge susceptible de le rassurer. Lui qui prétend que la sincérité est la valeur suprême (vers 387/390), toute la colère tombe, il y a un ton du supplice et presque de la confidence. Alceste devient alors pitoyable. [...]
[...] Son erreur stratégique est de montrer la face de son amour, de montrer qu'il est dominé. Alceste explique cet amour avec des excès de langage qui ne peuvent qu'effrayer une mondaine de XVIIe siècle, ridicule pour un public de l'époque. Un jaloux excessif: Au XVIIe siècle, on considère que l'amour fou est une véritable maladie, qui a des excès nocifs. La jalousie est ressentie comme ridicule et déplacée. Plus tard, vers le XIX, la jalousie est perçue comme une preuve véritable de l'amour. [...]
[...] Le registre se rapproche surtout de la tragédie avec "ciel", "quoi", soutenues par des phrases exclamatives (vers 1374/1375). L'adjectif généreux (vers 1379) caractérise les sentiments cornéliens. De plus, lorsqu'un héros tragique est dans une situation phycologique tendue, il se sépare à lui même (premiers vers). Son émotion est si grande qu'il parle de Célimène avec la troisième personne avec "elle" alors qu'elle est présente, comme un monologue. Ce registre surprend surtout chez une personne qui ne se soucie guère d'ordinaire des apparences. [...]
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